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BRICH59

20 janvier 2006

De l'esprit d'entreprise (5)

suite de ...

Plusieurs remarques (très personnelles) s'imposent.


Stratégie européenne pour l'emploi

La stratégie institue une coordination permanente des politiques de l'emploi des États membres par les lignes directrices pour l'emploi, qui sont rassemblées en quatre thèmes communs ou piliers:

  • Aptitude à l'emploi - Aider aussi bien les travailleurs que les sans-emploi à développer les compétences adéquates.

  • Esprit d'entreprise - Faciliter le démarrage et la gestion d'une entreprise, et permettre d'y employer plus facilement du personnel.

  • Adaptabilité - Élaborer de nouvelles compétences et façons de travailler dans un monde en mutation rapide.

  • Égalité des chances - Égalité d'accès à l'emploi pour chacun, aider à concilier vie professionnelle et familiale

Le cycle annuel de mise en oeuvre et de suivi des politiques nationales de l'emploi a été baptisé "processus de Luxembourg", car c'est au sommet sur l'emploi de Luxembourg en 1997 que les procédures ont été adoptées.


La panoplie des compétences clés a pour fonction de systématiser, de recentrer des énumérations de compétences existantes ici ou là, de redire, de façon plus serrée, à un endroit topique (quelque chose comme une base universelle et incontestable de discussion) ce qui se dit déjà dans l'éparpillement d'ailleurs identifiés...
Le tout sur un ton hyper-prescriptif : cf. "La recommandation proposée définit les compétences clés nécessaires à tous les citoyens dans l'économie et la société basées sur la connaissance. Elle reconnaît qu'il est préférable que les dispositions d'application soient prises au niveau national, régional et/ou local. Elle appelle les États membres à veiller à ce que tous les élèves aient acquis les compétences clés au terme de la période obligatoire d’enseignement et de formation et les encourage, à la lumière des critères de référence européens, à lutter contre les inégalités dans l’éducation. S'agissant des adultes, la recommandation appelle à la création d'importantes infrastructures en collaboration avec toutes les parties prenantes."


L'intégration de l'apprendre à apprendre montrerait qu'on parle en fait des compétences qui font l'autonomie de la personne... mais cf. ce qui suit au sujet de l'esprit d'entreprise.


Quand la commission ajoute à la panoplie l'esprit d'entreprise (ajout datant du Conseil de Lisbonne), il est légitime d'y voir une percée du discours libéral [esprit d'entreprise -> liberté d'entreprendre -> libéralisme], qui tente par tous les moyens de faire porter aux individus exclus ou en difficultés sociales la responsabilité de leur exclusion ou de leurs difficultés... Ce qui n'empêche pas (ou d'autant plus) que les gens de la Commission reconnaissent que "les personnes faiblement qualifiées sont moins susceptibles de participer à des formations" et qu'il est "donc plus difficile d'aider ceux qui en ont le plus besoin".


Il y aurait à gloser sur l'idée que l'esprit d'entreprise serait une "nouvelle compétence nécessaire dans une société de la connaissance"... ; souvenons-nous d'une certaine phrase de premier ministre français d'il y a trente ans !


Plus sérieusement, cf. les textes de Christian Laval, auteur de L’école n’est pas une entreprise (La Découverte, Paris, 2003) notamment, mais aussi d'une contribution dans Le Monde Diplomatique...


Les compétences clés se comprennent bien - même si cela n'est pas toujours explicite - en termes de "besoins professionnels", besoins pour le (bon) fonctionnement de l'économie européenne, l'éducation devant travailler (prioritairement ?) à la satisfaction de ces besoins. Vieux débats...


En termes de modèle socio-anthropologique, on est encore dans un humanisme à la Bertrand Schwartz, d'une part par le parti pris affiché de maintenir la globalité (cf. par exemple lorsque la Commission affirme que les inégalités dans l’éducation résultent souvent de la conjonction de circonstances personnelles, sociales, culturelles et économiques, et doivent être abordées en collaboration avec d'autres secteurs), d'autre part par la mise en avant de la finalité citoyenne et autonomisante de l'éducation.


Côté réalisation formation, un chantier pédagogique et d'ingénierie sur la base d'un tel échaffaudage conceptuel (pas forcément stable intrinsèquement) appelle une pratique serrée de large partenariat régional au sens large (y compris transfrontalier - cf. dynamique type EQUAL), mais aussi intersectoriel (formation continue + formation initiale + travail social + SPE + etc.).


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19 janvier 2006

Modernité et lisibilité sont les deux mamelles de la logorrhée politique

dominique_villepinAvez-vous écoutez Monsieur De et Madame Medef ? ou simplement lu la transcription de leurs propos publics ?
Moi oui !
Le premier en appelle à la modernité ! Il s'agit de rien moins que de « faire entrer le marché du travail français dans la modernité », c'est-à-dire d'intégrer dans le droit du travail, pour lutter contre le chômage des jeunes, le « contrat premier licenciement », comme dit si bien Le Canard enchaîné d'hier...
h_4_ill_669469_gamma_789155_3311La seconde en appelle à la lisibilité, c'est-à-dire - curieux raccourci, n'est-il pas ? - à la nécessité de « mettre en cause le concept de durée légale du travail ».
D'ailleurs, pratiquant une synthèse bienvenue ici, n'avait-elle pas affirmé, en d'autres temps, que « la modernité et la liberté de penser s'arrêtent là où commence le droit du travail » (cf. un ancien billet sur ce blog) ?

nathalie_croiset__le_reve_de_l_escalier_Faut-il vraiment que je développe ?
Pour dire qu'il est des mots qui ne veulent rien dire.
Pour dire qu'il est des mots qu'on utilise à contre-sens.
Pour dire qu'il est des mots qu'on utilise pour manipuler l'intelligence des citoyens et brouiller leur clairvoyance.

Photo ci-contre : Le rêve de l'escalier,
             sculpture de Nathalie Croiset


18 janvier 2006

De l'esprit d'entreprise, enfin ! (4)

suite de...

Parmi les huits compétences pointées par les experts européens, il en est une qui est au plus haut point intéressante : l'esprit d'entreprise.


Ce que dit la proposition de nov.2005
Définition

L’esprit d’entreprise se réfère à l’aptitude d’un individu à passer des idées aux actes. Il suppose de la créativité, de l’innovation et une prise de risques, ainsi que la capacité de programmer et de gérer des projets en vue de la réalisation d’objectifs. Cette compétence est un atout pour tout le monde dans la vie de tous les jours, à la maison et en société, pour les salariés conscients du contexte dans lequel s'inscrit leur travail et en mesure de saisir les occasions qui se présentent, et elle est le ferment de l’acquisition de qualifications et de connaissances plus spécifiques dont ont besoin les chefs d’entreprise qui créent une activité sociale ou commerciale.


Connaissances, aptitudes et attitudes essentielles
correspondant à cette compétence

La connaissance à avoir est celle des possibilités offertes aux fins d’activités privées, professionnelles et/ou commerciales, y compris d’aspects "de plus grande ampleur" qui sont révélateurs du contexte dans lequel des personnes vivent et travaillent, comme une compréhension générale des mécanismes de l’économie. Il s’agit également de la connaissance des possibilités offertes à un employeur ou à une organisation et des enjeux que ceux-ci doivent relever. Les individus devraient être au fait de la position éthique des entreprises, et de la manière pour elles de servir d’exemple en menant une activité commerciale honnête ou en étant une entreprise sociale.

Les aptitudes relèvent d’une gestion anticipative (planification, organi- sation, gestion, gestion de groupes et délégation, analyse, communication, compte rendu et évaluation et rapport), et de la capacité à travailler isolément ou en équipes. Il s’agit de l’aptitude à identifier ses points forts et ses faiblesses, et à évaluer et à prendre des risques jugés utiles.

Un esprit d’entreprise se caractérise par une disposition à prendre des initiatives, à anticiper, à être indépendant et novateur dans la vie privée et en société, autant qu’au travail. Il implique aussi motivation et détermination au travail et/ou dans la réalisation d’objectifs, qu’il s’agisse d’objectifs personnels ou de buts collectifs.



Ce qu'on peut en dire

Mis en avant comme compétence de base, il semble que l'"esprit d'entreprise" date du Conseil de Lisbonne. Mais il était déjà là, comme pilier de la politique emploi européenne...

De quoi on parle ?

Les Canadiens constatent que, "aujourd'hui, dans la plupart des pays de l'OCDE, on valorise l'esprit d'entreprise et la responsabilité personnelle. Les adultes sont censés être souples, ouverts, novateurs, créatifs, autonomes et motivés et assumer la responsabilité de leurs décisions et de leurs actes à titre d'apprentis, de travailleurs, de citoyens, de membres d'une famille ou de consommateurs". Il est vrai qu'on en parle beaucoup : environ 386.000 occurrences pour "esprit d'entreprise" sur la toile telle que visitée par Google le 12 décembre 2005...

Pour Bruno PONSON et Jean Louis SCHAAN (L'esprit d'entreprise. Aspects managériaux dans le monde francophone, 1993), "l’esprit d’entreprise, c’est générer les innovations et avoir la volonté de les voir aboutir". Pour Pierre André JULIEN et Michel MARCHESNAY (L'entrepreneuriat, 1996), "l’esprit d’entreprise peut être défini comme l’aptitude d’un individu, d’un groupe social, d’une communauté à prendre des risques pour engager des capitaux (pour investir, voire s’investir) dans une sorte d’aventure (« une entreprise »), consistant à apporter quelque chose de neuf (l’innovation), de créatif, ceci en employant et en combinant de la façon la plus performante possible des ressources diverses".

Claude Thélot (devant les députés, audition du 17 mars 2004) envisage "l'esprit d'entreprise, au sens large". Il précise que l'expression "peut prêter à confusion. Il y a un courant de pensée, dit-il, qui voit ces mots et qui se dit "globalisation", "marchandisation", ou même "américanisation". Je pense qu’il n’en est rien. Et il suffit de voir la définition de l’esprit d’entreprise qui a été donnée par la table ronde d’industriels européens, qui sont les grandes industries européennes, type Renault, Saint-Gobain, Suez. Et dont les intérêts sont clairement centrés sur la compétitivité. Je vais vous lire comment ils ont défini l’esprit d’entreprise dans un document qu’ils ont adressé aux chefs d’États et de gouvernements. Ils ont dit que même s’il est clair que l’Europe a besoin de plus d’entrepreneurs, l’esprit d’entreprise se définit comme le développement d’une capacité de créativité, d’innovation, de flexibilité, de travail en équipe et de curiosité intellectuelle. Alors on peut se demander si c’est vraiment ça l’esprit d’entreprise, mais on peut difficilement dire, je crois, qu’on veut s’opposer au développement de ces capacités chez les jeunes ou même chez les moins jeunes. Donc, esprit d’entreprise au sens large: pas la nécessité d’être un entrepreneur mais un sens de l’entreprise."

C'est en 1997 que l’Europe a défini les quatre piliers suivants de stratégie européenne pour l’emploi: l'employabilité, l'esprit d’entreprise, l'adaptabilité et l'égalité des chances, le FSE étant l’instrument financier de sa mise en oeuvre.... Du point de vue de la politique européenne de l'emploi, l'esprit d'entreprise, c'est "faciliter le démarrage et la gestion d'une entreprise, et permettre d'y employer plus facilement du personnel"...

Janvier 2003, la Commission présente son Livre vert L'esprit d'entreprise en Europe. Incitant l'Europe à relever ce "défi" qu'est l'esprit d'entreprise, ce document met en perspective une coordination des politiques en faveur de l'esprit d'entreprise et souhaite un engagement sur "trois axes d'action pour une société favorable à l'entreprise" : élimination des obstacles au développement et à la croissance des entreprises, recherche d'un équilibre stable et viable entre le risque et la rétribution de l’entrepreneur et valorisation de l'esprit d'entreprise dans l'Europe élargie...

L'esprit d'entreprise s'enseigne-t-il ?

"Peut-on apprendre l’esprit d’entreprise ?", demandent Ponson et Schaan. "Sans doute non, mais peut-être le révéler ou le renforcer là où il existe", répondent-ils aussitôt.

Et une des façons notoires de "le renforcer là où il existe", voire de "le révéler", c'est sûrement de favoriser son partage. L'esprit d'entreprise, c'est comme la bonne parole, comme la flamme de l'Esprit sur la tête des apôtres au quarantième jour après la Passion : ça se partage, ça se propage, ça contamine... De toutes les façons, ça se diffuse : la première des missions de l'APCE française (Agence Pour la Création d’Entreprises) n'est-elle pas précisément d'"assurer la diffusion de l’esprit d’entreprise" ? L'esprit d'entreprise est un vent qui sait porter l'innovation : l'un des principaux objectifs de l'eEurope n'est-il pas d'"introduire en Europe une culture numérique soutenue par un esprit d'entreprise favorable au financement et au développement de nouvelles idées" (document fondateur de 1999) ? Élargissant le cercle territorial, on peut aller voir les missions de la Jeune Chambre Internationale, fédération mondiale de jeunes professionnels et chefs d'entreprise, âgés de 18 à 40 ans, dont la mission est de "contribuer au progrès de la communauté globale en offrant aux jeunes les moyens de développer les aptitudes à diriger, la responsabilité sociale, les contacts amicaux et l'esprit d'entreprise, nécessaires pour créer un changement positif"...

Bref, l'esprit d'entreprise, ça souffle, ça se souffle, mais ça ne s'apprend pas ! Sauf que, un peu partout en Europe, il y a plein d'expériences pédagogiques centrées sur l'objectif de son développement, voire de son acquisition... et qu'aujourd'hui la Commission inscrit l'esprit d'entreprise comme compétence de base à acquérir dans l'enseignement obligatoire initial et à entretenir (voire acquérir si ce n'est déjà fait) dans le cadre élargi de l'éducation permanente. Il y a trois ans le livre vert sur l'esprit d'entreprise en Europe affirmait que "l'éducation et la formation devraient contribuer à promouvoir l'esprit d'entreprise en stimulant les mentalités, la prise de conscience des opportunités de carrière en tant qu'entrepreneur et les compétences." L'une des dernières questions que posent le livre vert se formule ainsi : "Comment l'éducation peut-elle contribuer à sensibiliser davantage et à fournir les outils nécessaires au développement d’attitudes et de compétences entrepreneuriales (enseigne- ment de l'esprit d'entreprise à l'école, témoignages d'entrepreneurs dans les écoles, stages auprès d'entrepreneurs expérimentés, extension de la formation entrepreneuriale à l'université, davantage de filières en commerce et gestion (de type MBA), adéquation entre la formation à l'esprit d'entreprise et les programmes de recherche publics)?"...


Déjà expérimenté

Il existe une "agence polonaise pour le développement de l'esprit d'entreprise" - Pologne où "la ZRP [= Chambre polonaise des métiers] coopère avec le ministère de l'éducation nationale pour créer les conditions adéquates d'une éducation à l'esprit d'entreprise."

En Allemagne (Projet pédagogique "Atelier d'avenir"  / DGB - le monde de l'apprentissage pour l'orientation professionnelle), "une cyber-formation favorise l'acquisition de qualifications essentielles pour la vie professionnelle, comme l'esprit d'entreprise et les compétences en communication."

En Allemagne, "Apprendre tout au long de la vie implique d’encourager la collaboration entre les organismes de formation et les entreprises. Ces partenariats doivent intensifier le contact des élèves et des enseignants avec le monde du travail à travers des stages en entreprises pour les élèves et des offres de formation continue pour les professeurs sur les thèmes du monde du travail. Dans ce contexte, les contenus de formations se centrent sur la capacité à communiquer, la maîtrise des médias, l’esprit d’entreprise et l’ouverture sur le monde (acquisition de connaissances en langues étrangères, séjours à l’étranger, coopération transfrontalière). Dans le système dual de la formation professionnelle initiale, les règlements de formation pour la partie en entreprise (législation fédérale) et le programme pour la partie de la formation en établissement de formation (législation des Länder) intègrent ces nouvelles exigences."

Au Danemark : "un programme d’action pour développer l’esprit d’entreprise à travers tout le système scolaire (de l’école élémentaire jusqu’à l’enseignement supérieur) valorisant les qualités personnelles de courage et d’initiative, la culture d’innovation liée à l’usage des nouvelles technologies et au travail en réseau, et abordant les matières nécessaires au développement d’une activité."

En Slovénie, "outre l'amélioration des connaissances professionnelles, les partenaires sociaux ont mené à bien activement plusieurs programmes de formation à l'esprit d'entreprise pour les salariés, les jeunes et les chômeurs, en vue d'améliorer la compétitivité et la réussite des entreprises."

En France, sans parler des intrusions répétées des organisations patronales dans l'école (il suffit de lire Le Monde Diplomatique pour en être informé), on a http://www.pme.gouv.fr/espritdentreprise/index.php qui nous enjoint : « Libérez votre esprit d'entreprise ! », comme s'il s'agissait d'une pulsion naturelle qu'il s'agirait de laisser agir, la loi ayant cet office-là  !

à suivre


17 janvier 2006

Rapid elearning

Le rapid elearning consiste à transformer et diffuser rapidement du contenu existant (par exemple un cours en Powerpoint) sous forme multimédia, grâce à des outils variés caractérisés par leur simplicité d'utilisation et malgré son nom ne s'applique pas seulement au elearning. Éric Delcroix en parlait déjà l'an dernier...
Cette année, Éric nous organise trois conférences sur le sujet
Ce sera le

vendredi 20 janvier de 14 à 17 h
au C2RP, Immeuble Le Vendôme
50, rue Gustave Delory - 59800 LILLE
.

Trois conférences offertes dans la cadre du projet des étudiants du Master IDEMM de Lille 3 (UFR IDIST) : la création d'un site dédié au Rapid elearning.

Lpub_carrees intervenants sont:

Le tout sera animé par Eric Delcroix ‹ Les zed

Grâce à Speechi live les conférences seront diffusées gratuitement en direct sur Internet (présentation et audio avec une possibilité d'interrogation à distance) et également en MP3 Live.

Dans la soirée, les bloggers et les non bloggers qui désirent découvrir la blogosphère se retrouveront dès 19 h au Pain Quotidien (35, place Rihour 59000 Lille) pour des échanges variés et non dirigés

Pour plus d'informations sur blog en nord, cliquez ou écrivez à cette adresse.

Cette nouvelle reprend un message d'Éric Delcroix


16 janvier 2006

De l'esprit d'entreprise (3)

suite de ...

Le 10 novembre 2005, la Commission affirmait que "les États membres doivent accélérer le rythme des réformes de leurs systèmes d’éducation et de formation, faute de quoi une forte proportion de la prochaine génération sera confrontée à l’exclusion sociale".

La Commission insiste sur l'urgence de la situation : les orientations énoncées dans la stratégie de Lisbonne pour la croissance, l’emploi et la cohésion sociale, notamment celles qui visaient l'amélioration des qualifications et des compétences des jeunes, n'ont pas été suffisamment travaillées. "Les conséquences en seront graves pour tous les citoyens, poursuit le communiqué, en particulier les groupes défavorisés et les quelque 80 millions de travailleurs peu qualifiés en Europe, ainsi que pour l'économie tout entière, en matière de compétitivité et de création d'emplois."

Lors de la même séance de travail, la Commission a également approuvé une proposition visant à établir un cadre européen des compétences clés - outil de référence pratique destiné à soutenir les efforts des États membres dans leur rattrapage de la stratégie de Lisbonne.    

Les objectifs de cette proposition sont:

  • d'identifier et de définir les compétences clés ;

  • de soutenir les travaux des États membres visant à assurer qu'au terme des cursus d'éducation et de formation initiales, les jeunes aient acquis une maîtrise suffisante des compétences clés et que les adultes soient à même de développer et d'actualiser ces compétences tout au long de leur vie ;

  • de proposer un outil de référence européen ;

  • de constituer un cadre pour l'action communautaire à venir.

Dans cette proposition, les compétences clés, ce sont "les aptitudes, connaissances et attitudes jugées essentielles, que tout Européen devrait avoir pour réussir dans une société et une économie fondées sur la connaissance. [...] Elles s’appuient sur des qualifications de base et comportent des « éléments horizontaux » tels que la réflexion critique, la créativité, la dimension européenne et la citoyenneté active. Conjointement, ces compétences contribuent à l'épanouissement personnel, favorisent la participation active et améliorent la capacité d’insertion professionnelle."

On appréciera le flou conceptuel et le manque de précision référentielle d'une telle phraséologie à tiroirs !   
Reste que l'un des objectifs - discrètement énoncés - de cette proposition est bien de clarifier les choses et de rendre possible une communauté de langage entre les États européens sur un thème si fouilli... Le problème (selon moi et ceci n'engage que moi) est que tant que le système conceptuel emploi/éducation/formation ne sera pas explicité jusque dans ces contradictions les plus invivables, le langage ne pourra être clair...

Il faut noter également une distinction topique entre les "compétences professionnelles spécifiques" et les "compétences génériques", celles qui permettent de s'adapter aux changements - changements dûs à l'internationalisation croissante des économies (qui "influe sur le monde du travail, entraînant des changements rapides et fréquents, l'introduction de nouvelles technologies et de nouveaux modes d'organisation des entreprises").

Ces compétences clés sont au nombre de huit :

  1. Communication dans la langue maternelle

  2. Communication dans une langue étrangère

  3. Culture mathématique et compétences de base en sciences et technologies

  4. Culture numérique

  5. Apprendre à apprendre

  6. Compétences interpersonnelles, interculturelles et compétences sociales et civiques

  7. Esprit d’entreprise

  8. Expression culturelle

Le communiqué de presse du 10 nov. (IP/05/1405) ajoutent l'idée que ces compétences clés "s’appuient sur des qualifications de base et comportent des « éléments horizontaux » tels que la réflexion critique, la créativité, la dimension européenne et la citoyenneté active" ; et que "conjointement, ces compétences contribuent à l'épanouissement personnel, favorisent la participation active et améliorent la capacité d’insertion professionnelle".


À terme, on voit poindre un cadre européen des certifications ; cf. le doc. "Bruxelles, 8/7/2005, SEC(2005)957" ... avec notamment ceci : "Communication dans la langue maternelle, communication dans une autre langue, compétences de base en mathématiques, science et technologie, compétences informatiques, apprendre à apprendre, compétences interpersonnelles et civiques, esprit d'entreprise et expression culturelle. Ces compétences devraient êtres acquises à la fin de l'enseignement et de la formation obligatoires et être conservées tout au long de la vie. Ces compétences clés ont été intégrées en partie dans les niveaux de référence commun et les descripteurs d'un CECP".

à suivre


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14 janvier 2006

De l'esprit d'entreprise (2)

suite de...

L'origine immédiatement visible du travail de cette notion de compétence clé est anglo-saxonne. Et quand on observe les mots anglo-américains utilisés pour désigner cette notion, on arrive à l'équation booléenne suivante :

(key OU core OU basic) (competences OU competencies OU qualifications OU skills)

  • competences / competencies / qualifications / skills

Par exemple, pour l'idée d'un ouvrier non qualifié, d'un manoeuvre, l'anglais dira "unskilled worker" ; pour l'ouvrier qualifié, il dira "skilled worker", l'ouvrier spécialisé étant un "semi-skilled worker". Le "multiskilled worker" sera le "travailleur polyvalent".

Ailleurs on parlera de "skill obsolescence" pour dire "qualification obsolète". Et la mise à jour, le recyclage professionnel, se dira "updating of skills". On a aussi "professional qualifications" pour "qualification professionnelle", et "recognition of vocational training qualifications" pour "reconnaissance des qualifications professionnelles"...

Quand nous parlerons de "pratique de communication", de "pratique de négociation" ou de "pratique de rédaction" et de la technicité qui va avec, l'anglais utilisera "skills" ("communication skills", "negotiation skills" ou "writing skills") là où l'espagnol s'appuyera sur l'idée de techniques ("técnicas de comunicación", "técnicas de negociación" ou "técnicas de redacción").

On voit qu'on n'est pas directement sur l'idée, complexe, de compétence...

On notera avec intérêt que l'espagnol "competencia" est équivalent à notre "concurrence" (on a ainsi "libre competencia" pour "libre concurrence" ("free competition"  en anglais) ; ou encore "obligación de no competencia", "restricción de la competencia", et "politica de competencia").

Enfin, il ne faut pas négliger le sens de compétence comme pouvoir ("répartition des compétences", par exemple, se dira "division of powers"  en anglais).

Très concrètement, la Commission (groupe de travail créé en 2001 dans le contexte du programme de travail Éducation et formation 2010) a opté pour le terme français "compétence" - pour ce qu'il renvoie à une combinaison d’aptitudes, de connaissances et d’attitudes (appropriées à une situation donnée).

  • basic skills/key competences/core skills

Pour traduire "key competences", la CE propose "compétences de base", comme en témoigne le document du 18 novembre dernier, Proposition de RECOMMANDATION DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL sur les compétences clés pour l'éducation et la formation tout au long de la vie, qui précise (note 1) :

« On entend généralement par 'compétences de base', l'aptitude à la lecture, à l'écriture et au calcul; le Conseil de Lisbonne a appelé à y ajouter les nouvelles compétences nécessaires dans une société de la connaissance, comme la maîtrise des TIC et l'esprit d'entreprise. »

Globalement, il s'agit des "competencies for living and participating in society", si l'on reprend une formulation du EAEA qui expliquait en mars 2004 :

« The EAEA invites applications for the 2nd Grundtvig Award contest with the theme: Basic Skills / Key Competences ( i.e. key competencies for living and participating in society).

These key competencies are the "traditional" skills of literacy and numeracy, and include the new ICT skills; communication in the mother tongue and in a foreign language. Equally important are interpersonal and civic competences, basic competences in science and technology, learning to learn, etc. »

Lue quelque part cette expression : "basic skills in the sense of key competences for life" (NGO platform on Future Objectives of Education and Training Systems in Europe: EUCIS (European Civil Society) - programme de 2001).

Très concrètement, la Commission (groupe de travail créé en 2001 dans le contexte du programme de travail Éducation et formation 2010) a opté pour l'expression française "compétence clé", pour définir les compétences nécessaires à tous - ce qui, précise la Commission, couvre donc le concept de «compétences de base», mais va au-delà de celui-ci.

Tout ceci est à mettre, bien sûr, en relation avec la terminologie française développée depuis les années 70/80, notamment autour de l'expérimentation des Unités Capitalisables avec les "capacités transversales", puis dans les années 80/90, notamment autour de la "qualification sociale", enfin plus récemment avec l'idée de "savoirs de base" et celle de "socle commun".   

Quand je dis mettre en relation, je veux marquer qu'il ne saurait y avoir assimilation pure et simple. En fait la simple mise en relation est déjà très complexe, étant donné les origines et les significations profondes de chacune de ces expressions...

  • compétences transférables ?

On parle aussi beaucoup d'horizontalité ; cf. la "nature horizontale" de l'esprit d'entreprise ; cf. aussi l'idée d'une "catégorie d'emplois transversale/horizontale (NTIC, marketing ou ressources humaines)" ; cf. les "« éléments horizontaux » tels que la réflexion critique, la créativité, la dimension européenne et la citoyenneté active".

à suivre


13 janvier 2006

Péché originel : au placard !

p_ch__originel__d_tails_Je n'ai jamais trop cru à l'histoire du péché originel tel que la Bible nous le narre... Mais je crois dur comme fer au péché congénital de la bibliothéconomie !
Le péché originel de la documentation et de la bibliothèque, c'est que ces services sont trop souvent et systématiquement pensés par les hiérarchies comme des placards plus ou moins sympathiques. Avant que ne se généralise la formation initiale diplômante dans ces filières, c'est bien dans ces services qu'on mettait les incapables qu'on ne peut virer purement et simplement, les recyclés d'office. Combien de documentations d'établissements scolaires ont été animées par des enseignants qui avaient perdu la compétence didactique et le goût de la relation pédagogique ! Ce qui bien sûr est absurde eu égard aux compétences attendues des documentalistes... Ceci dit, nombre de services documentation sont nés ainsi, parce qu'il fallait caser un(e) "incapable", parce qu'il fallait trouver un placard. C'est l'impact positif du péché originel... si tant est que les gens se sont formés aux techniques documentaires ensuite ! Bref, reste que nous, documentalistes, bibliothécaires, avons tous été témoins un jour ou l'autre des dégâts causés par ce péché originel de la bibliothèque-documentation.
On pourrait penser que le développement de l'offre de formation qualifiante dans notre secteur montre que le péché originel est périmé et interdise ce type de pratique de placardisation documentaire ou bibliothécaire ! Eh bien non ! Pas dans la grande muette ! lemondeRegardez cette histoire des deux adjudants qui, si l'on en croit Le Monde paru ce soir (en bas de la page 11), « viennent d'assigner leur commandant de groupement en justice pour "harcèlement moral". S'estimant "placardisés depuis des mois", "affectés à des tâches ridicules et sans rapport avec leur qualification", "isolés du reste du service" [...] ». Je passe sur leur triste histoire. Mais devinez comment s'est concrétisée la placardisation de l'un des deux sous-officiers... Dans le mille ! On l'a mis à la bibliothèque ! Si si : pour le punir on lui a proposé un poste de bibliothécaire...

Sans commentaire et le doigt sur la couture du pantalon ?


12 janvier 2006

De l'esprit d'entreprise (1)

Les compétences clés pour l'éducation et la formation tout au long de la vie. Tel est le nouveau thème de la politique éducative européenne. Ça fait même un bout de temps que cette thématique traîne dans les tiroirs des experts européens... En novembre dernier la commission a sorti une "recommandation", pardon, une "proposition de recommandation" qui veut faire le point là-dessus...

Dans l'argument d'un forum organisé par l'OOFP (Office d’orientation et de formation professionnelle) helvète en mars 2003, on peut lire ceci: Les compétences sont à la mode: tout le monde en parle. Les définitions abondent. Certains en ont même recensé 200! C’est dire l’importance des compétences en cette période de récession économique sur fond de nouvelles formes d’organisation du travail et de nouvelles technologies. La compétence est devenue un enjeu pour se positionner sur un marché de l’emploi difficile et défendre son employabilité. Aujourd’hui émerge un nouveau concept: celui des compétences-clés, qui sont essentielles pour réussir sa vie personnelle et professionnelle. Quelles sont ces compétences-clés? Comment les identifier? Comment les reconnaître? Et surtout comment les évaluer? Sur quels critères, pour quels résultats, avec quels outils?

Aujourd'hui on peut dire de l'expression "compétences clés" que c'est:

  1. une notion linguistiquement assez floue (problèmes de stabilité lexicale, et problèmes de traduction);

  2. une notion européenne, située au croisement pas toujours immédiatement visible de différentes problématiques politiques, où la politique emploi assujettit à la fois la politique sociale (on évoque la "viabilité à long terme du modèle social européen" [¿ c'est quoi le "modèle social européen"?]) et la politique éducation.

à suivre


11 janvier 2006

Racaille ?

05/01/06
Le TGI de Paris condamne l’usage du terme « racaille » sur internet

sosfrance_2_agrandissementLe mot « racaille » n’est pas un terme neutre qui peut impunément être employé sur internet. Dans un jugement très motivé du 24 novembre 2005, la 17ème chambre du TGI de Paris vient, à nouveau, de rappeler que la liberté d’expression connaît des limites. Il a condamné le directeur de publication du site « sosfrance.com » pour diffamation, injure publique et provocation à la discrimination nationale, raciale et religieuse. Bien que le responsable éditorial ne soit pas l’auteur intellectuel des textes en question piochés sur internet, le tribunal rappelle « qu’il a pris la responsabilité d’une nouvelle diffusion en les mettant en ligne, selon une présentation de son choix, sur son propre site ».
Il lui était notamment reproché d’avoir publié des textes dont certains passages prêtaient aux musulmans « un dessein criminel de nettoyage ethnique ou religieux dans le pays de leurs hôtes ». Il a également été sanctionné pour avoir diffusé sur la page d’accueil du site plusieurs slogans dont le fameux « Assez de racailles. Résistance ». Pour caractériser l’utilisation de cette invective de délit d’injure, le tribunal s’est appuyé sur les définitions des dictionnaires Littré et Robert du terme « racaille ». Il en a conclu qu’il était « performatif » et que son seul emploi créait « la proscription ». Le tribunal a également pris en considération l’environ- nement dans lequel il était placé. « Inséré dans la bannière d’accueil d’un site tout entier consacré à l’islam et aux musulmans et associé à une photographie représentant deux jeunes femmes voilées, il désigne, offense et outrage les musulmans en tant que tels, et porte une atteinte indistincte aux personnes, non pour ce qu’elles seraient, individuellement prises, mais à raison de leur religion ».
Le responsable de publication condamné n’a pas fait appel du jugement qui devient donc définitif. Il a été condamné à trois mois de prison avec sursis et à verser deux mille euros à la Ligue des droits de l’homme au titre des dommages et intérêts et de l’article 475-1 du code de procédure pénale pour les frais de justice engagés.

reprise [sans commentaire mais c'est moi qui souligne] de http://www.legalis.net/


11 janvier 2006

L'ActIonaute de Janvier

l'ActIonaute ©Amnesty International               Janvier2006

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