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BRICH59
ideologie liberale
3 mai 2008

Le 2 mai ... 1958

J'ai reçu L'Express, gratos, cette semaine. Pub !
Donc je le lis, évidemment.
C'est le numéro "spécial" 1968 : l'année qui a changé le monde pérore le couverture...
Je lis l'édito. Vague marmelade immangeable, qui se clôt sur ces mots d'une vertigineuse hauteur : Ils avaient 20 ans et, si leurs idéologies étaient fausses, leurs idéaux étaient magnifiques. Quarante ans plus tard, on peut leur murmurer que c'était l'essentiel...  Un texte à donner en pâture aux élèves de philosophie, dans la série Comment montrer le vide du discours puis dans la série Comment dépister l'implicite... Pour les bons élèves seulement !
Bref, je tourne la page et y trouve ce que le service documentation de l'hebdomadaire a sorti des archives cinquantenaires et lis ceci : Dans un long entretien, le ministre de l'Algérie Robert Lacoste exprime sa conviction de toucher au but : « plus d'un million de musulmans verront bientôt la victoire française, à savoir la paix, le travail, la sécurité, l'éducation politique ».

Vous je ne sais pas, mais moi, me vient immédiatement à l'esprit le discours sarkoz-ambiant, les pratiques gouvernementales de l'époque, de notre époque. Les Français sont colonisés par les ultra-libéraux du pouvoir. Ceux-ci auraient tort de se priver : ceux-là l'ont voulu - ce qui n'était pas le cas des Algériens !

Pardon, lecteur sarkozien, mais je ne peux pas ne pas penser, aussi et de façon plus anecdotique, à ce fonctionnaire du ministère de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Développement solidaire [sic] mis en cause par un agent de sécurité (le comble au Pays du Roi d'Maubeuge et de son lieutenant Hortefeux, fils d'un banquier de Neuilly !) pour injure raciste... Je vous laisse lire le Canard enchaîné de cette semaine. Ah ! Elle est belle l'identité nationale !

Tout ceci m'invite à vous inciter à lire l'article d'Anne-Cécile Robert dans le Monde Diplomatique de ce mois : Que s’est-il donc passé le 6 mai 2007 ? [Moins d’un an après l’élection de M. Nicolas Sarkozy, les Français ont massivement accordé leurs suffrages aux candidats de gauche lors des municipales de mars 2008. Les électeurs seraient-ils versatiles ? Faut-il désespérer de la démocratie ? Une relecture des événements conduisant à la présidentielle de 2007 fait apparaître d’autres éléments d’explication.]


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21 mars 2008

Destins de la FPC en France

Initialement pensée comme levier du progrès humain, la formation permanente a été avalée par l'une de ses parties, la formation professionnelle. C'est ainsi qu'on pourrait résumer d'une phrase une seule le destin de la formation dans ses premières décennies d'existence légale. La loi de 1971 est très ambigüe  sur cette distinction des finalités de la formation. Ou alors il n'y a rien d'ambigu. Juste une tendance qui pointe son nez dès l'origine législative et qui aujourd'hui se montre au grand jour, sans vergogne aucune : la formation continue est au service de l'emploi, au point qu'il faut éviter les "situations de pure formation sans rapport préétabli à l’emploi".

C'est la réflexion que m'inspire la lecture de la production de Jean-Louis Dayan du Centre d'Analyse Stratégique, chargé de réfléchir sur le devenir de la FPC.

La formation limitée à un rôle ancillaire au service de l'emploi, c'est très très concrètement la formation au service de ceux qui embauchent (ou pas justement !). La chantage à l'emploi fonctionne ici à plein régime, de façon à ce que la collectivité finance encore et toujours ceux qui profite de l'activité économique nationale...

Le jour où les ultralibéraux sauront se passer des aides de la collectivité, les poules auront des dents, mais les chômeurs et les précaires et autres travailleurs pauvres n'en auront plus, faute de pouvoir aligner les biftons chez le dentiste et le pharmacien - qui eux vont très bien.


6 janvier 2008

"Culte du pragmatisme et du résultat" ?

Franchement, tout est fait pour brouiller les pistes dans cette France qui gouverne. Même Martin Hirsch s'y met, qui a salué le "culte du pragmatisme et du résultat" du roi d'Maubeuge ! Entendez : le refus de l'idéologie et des bonnes intentions - comme disent ceux qui prêchent l'inexistence de la lutte des classes, je veux dire les apolitiques de droite.

Comme si ce pauvre Martin ne savait pas que, si le pragmatisme avait de tous temps été une bonne méthode de gouvernement, on le saurait déjà. Il aurait déjà fait son œuvre, le pragmatisme, et il n'y aurait plus de pauvres dans ce pays où le CAC40 ne cesse de progresser depuis qu'il a été créé et où les riches s'enrichissent toujours davantage - le roi d'Maubeuge soi-même, le Président de Gaz de France aussi. Peut-être le pragmatisme consiste-t-il par définition à prendre aux pauvres pour donner aux riches...
Quelle misère de voir ainsi de si bonnes âmes (?) tomber dans les filets du pouvoir par simple goût du ... pouvoir !


2 janvier 2008

À quoi sert "l’identité nationale" ?

Le Comité de vigilance sur les usages de l’histoire (CVUH) nous invite, Jeudi 10 janvier 2008, à la conférence de Gérard Noiriel, directeur d’études à l’EHESS: À quoi sert "l’identité nationale".
Cette conférence reprendra les grandes lignes de l’analyse développée dans l’ouvrage qui a inauguré la collection du CVUH (Ed.Agone, 156 pages, 12€; en librairie depuis fin octobre 2007) :

  • Genèse de l’expression "identité nationale", et ses équivalents ("âme nationale", "caractère national", etc.), pour montrer qu’il n’existe aucune définition scientifique satisfaisante.

  • La question de l’identité nationale, enjeu politique majeur depuis l’affaire Dreyfus.

  • Comment le clivage droite/gauche autour de l’identité nationale a été réactivé pendant la campagne électorale du printemps 2007.

La conférence commencera à 19H00. Elle durera une heure et sera suivie d'un échange avec les participants. Elle aura lieu à la Sorbonne dans l’amphithéâtre Bachelard (galerie Gerson, entrée place de la Sorbonne).

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Moi qui ne suis pas parisien, je ne pourrai assister à cette manifestation. Merci aux parigots de nous en poster un compte-rendu !


28 mai 2007

Vol AF 796 pour Bamako - suite

En début d'après-midi, ce communiqué de RESF.


L’HUMANITÉ DANS LES MOTS, LA BRUTALITÉ DANS LES FAITS

Le Malien dont l’expulsion a été empêchée le 26 mai par l’intervention de passagers indignés des violences qu’il subissait sur le vol Air France Paris-Bamako est libre.

En effet, bien que la police l’ait particulièrement chargé en portant plainte pour trois motifs (« opposition à une mesure d’éloignement », « refus d’embarquement » et « coups et blessures contre un policier »), le Juge des libertés et de la détention du TGI de Bobigny a décidé de ne pas le traduire en comparution immédiate, de le libérer et de le convoquer en justice le 28 juin. Une décision qui est un démenti cinglant aux rumeurs colportées aussi bien par les policiers dans l’avion que par un collaborateur du ministre tendant à le faire passer pour un dangereux délinquant.
Les conditions de brutalité particulièrement choquantes dans lesquelles s’est déroulée cette tentative d’expulsion sont aussi un démenti sans appel aux propos du nouveau ministre qui, dans ses déclarations, prétend conjuguer "fermeté et d'humanité" (« l’un ne va pas sans l’autre ») alors que dans les faits, la brutalité et elle seule préside aux expulsions.

Cette violence à l’égard des expulsés s’accompagne d’une volonté de plus en plus affirmée de réprimer tous ceux qui seraient tentés de ne pas laisser faire, de ne pas se taire, de ne pas fermer les yeux. 
Cette affaire, qui a conduit à l’annulation du vol du 26 mai pour Bamako place Air France devant ses responsabilités : rien, aucune loi, aucun règlement n’oblige une compagnie aérienne, privée de surcroît à accepter des voyageurs contraints sur ses vols, menottés, parfois bâillonnés, attachés à leur siège  et tabassés quand ils protestent. Les clients de la compagnie ne prennent pas non plus des billets Air France pour être menacés par la police quand ils s’élèvent contre des scènes choquantes, et, pour certains d’entre eux, évacués de force de l’avion, molestés, placés en garde à vue et poursuivis comme le sont Kadidja  et François Auguste traînés en justice et menacé de 5 ans de prison et 18 000 € d’amende pour n’avoir pas toléré les conditions inhumaines imposées aux reconduits. Les passagers d’Air France achètent des billets pour se déplacer dans des  conditions normales de sécurité et de confort. Ils veulent voyager dans un avion, pas dans un fourgon cellulaire volant.


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27 mai 2007

Vol AF 796 pour Bamako

logo3Il y a à peine plus de deux heures, un message est tombé dans ma boîte aux lettres électronique. C'est un communiqué de RESF. Il contient le témoignage de passagers du vol Air France 796 Paris-Bamako d'hier en fin d'après-midi...
Je ne peux pas ne pas me faire relais de ce texte - que voici.


Samedi 26 mai. Vol AF 796 pour Bamako.
Quelques minutes avant la fermeture des portes, des cris au dernier rang de l'avion. Une reconduite à la frontière classique.
Deux personnes tentent de contenir un homme d'une quarantaine d'années qui se débat violemment. On croit d'abord à une bagarre entre passagers. Certains veulent les séparer mais en sont vite dissuadés par les policiers qui se font alors connaître. S'ensuit une scène d'une grande violence: l'un des policiers pratique un étranglement sur le passager, l'autre lui assène de grands coups de poing dans le ventre. Ses hurlements se transforment en plaintes rauques. Cette tentative de maîtrise dure dix bonnes minutes, peut-être plus, et suscite immédiatement chez les passagers un mouvement de protestation qui n'a aucun effet sur les violences en cours.
L'un des passagers filme la scène avec son téléphone, ce qui énerve un peu plus la responsable de l'opération, qui menace d'arrestation les personnes les plus proches et photographie les protestataires.
Pour tenter de faire taire tout le monde, la policière explique que l'homme n'est pas un simple sans papiers, mais un repris de justice, soumis à la double peine. Cela semble à ses yeux justifier la méthode et toute la violence exercée sur lui.
Sous les huées des passagers, l'homme finit par être immobilisé et sanglé. Il perd connaissance, yeux révulsés, langue pendante, écume aux lèvres. Un mouvement de panique gagne les policiers. Ils prennent alors la décision de l'évacuer. Autour de nous, de nombreux passagers imaginent que l'homme est mort, ce qui fait encore monter d'un cran l'émotion. Des femmes pleurent, des gens convergent de tout l'appareil, rajoutant à la confusion. C'est alors qu'une bonne dizaine d'agents de la Police des Air et des Frontière, la PAF, fait irruption dans l'appareil.
Désigné par la responsable de l'opération, Michel Dubois, qui comme nous tous avait pris part aux protestations, est débarqué pour auditions. D'autres passagers, choqués par cette arrestation, sont à leur tour menacés du même sort.
A bord, on nous demande vainement de nous rasseoir, de nous calmer mais beaucoup exigent le retour de Michel Dubois. Un des policiers, visiblement dépassé par la situation, nous propose alors un marché: Michel pourrait réembarquer à condition que l'expulsé remonte lui aussi à bord. La balle était donc dans notre camp, nous serions responsable du retard de l'avion, et même de l'éventuelle annulation du vol. Michel devenait clairement une monnaie d'échange.
Cette proposition inacceptable est d'ailleurs tout de suite contredite par un policier de la PAF qui annonce la garde à vue de Michel Dubois et réitère ses menaces à l'égard des passagers qui campent sur leurs positions.
Le commandant de bord finit par faire une annonce, dans laquelle il fait état de "manœuvres" d'un individu refusant d'être reconduit dans son pays d'origine, et de manifestations d'une minorité de passagers pour expliquer l'annulation du vol.
Nulle mention des violences dont nous avions été témoin, ni de l'état de santé du passager pourtant aperçu dans une ambulance stationnée au pied de l'appareil, toujours inconscient et sous assistance respiratoire.
Nous sommes nombreux, comme Michel Dubois, à être choqués par la barbarie de la scène, par le traitement excessivement violent qui a été infligé sous nos yeux à cet homme, fut-il repris de justice, (ce dont il nous est d'ailleurs permis de douter, puisqu'afin de ne pas attirer l'attention des autres voyageurs, les policiers avaient d'abord décidé de le faire voyager sans le menotter).
Nombreux aussi à avoir la désagréable impression d'avoir été pris en otage par les autorités et profondément choqués par l’attitude du Commandant de bord d’Air France qui n’est pas intervenu pour faire cesser ces violences les tolérant même au mépris de la sécurité des passagers qu’il se doit d’assurer et en prenant la responsabilité de faire annuler le vol empêchant du même coup des centaines de personnes de faire le voyage pour lequel elles avaient acheté un billet.
Nous sommes enfin révoltés d'avoir été contraints de devenir complices des policiers en obéissant aux différentes injonctions et menaces proférées à notre encontre. Devions-nous laisser se dérouler sous nos yeux des actes d'une telle brutalité?
Pouvions-nous accepter l'arbitraire de l'arrestation de l'un d'entre nous dont le seul tort avait été de s'indigner et de parler avec les policiers pour tenter de faire cesser la violence? Il y a là une pénalisation de la solidarité qui nous semble inadmissible et inquiétante quant à l'état de notre démocratie.
Nous ne sommes pas assez naïfs pour croire que cette scène est un cas isolé, une bavure en somme. Nous savons qu'elle se reproduit quasi quotidiennement, et nous tenons à manifester notre indignation en relatant les faits le plus exactement possible.
Michel Dubois a été relâché quelques heures plus tard, mais on l’a informé que des poursuites seraient engagées contre lui. Quant au passager Malien, nous n'avons aucune nouvelle de lui, et son état de santé ainsi que le sort qui lui sera réservé dans les prochains jours nous inquiètent au plus haut point.

Des passagers du vol AF 796.


18 mai 2007

Signes ostentatoires...

Quelle misère, toutes ces mises en scène qui veulent nous faire croire que Sarkozy est :

  • un homme comme les autres qui peut s'émouvoir et verser une larme bien visible ;

  • un père qui sait prendre son enfant dans les bras devant les caméras ;

  • un mari qui aime sa femme et le montre à la population, toujours devant les caméras ;

  • un jeune quinqua qui veut nous faire croire qu'il a l'esprit sain parce qu'il veut un corps sain ;

  • un chef d'entreprise qui sait récompenser la beurette méritante ;

  • etc.

Quelle misère aussi, cette porosité entre lui et les médias étalée au grand jour, avec ces journalistes de l'hebdomadaire Le Point et du quotidien Le Figaro promus à des rôles politiques, comme si leur rôle dans la propagande sarkozienne était récompensé au nez et à la barbe des gens qui ont la démarche pure et croient encore en la séparation des pouvoirs (y compris donc le quatrième). Quand je dis croire en la séparation des pouvoirs, je ne veux pas dire que les moralement purs sont niais au point de croire que cette séparation existe de facto. Ils ont juste la faiblesse de croire que c'est un idéal à atteindre, un principe régulateur à respecter...

Deux séries de signes ostentatoires :

  1. ceux qui ont pour fonction de fabriquer une image d'Épinal d'un homme qui n'a jamais fait que courir après son ambition, nous le montrant à la fois tendre et activiste, image idéal du gentil et compétent patron d'industrie, celui que tous les salariés voudraient avoir comme chef, en même temps qu'un gentil papa amoureux de sa femme, et sensible à la misère du monde, etc.

  2. et ceux qui ont pour fonction de faire accepter par l'opinion, doucement mais sûrement, la réalité (et donc, par un tour de passe passe bien connu en politique, sa légitimité de fait) de la confusion des pouvoirs, la servilité de certains médias vis-à-vis d'un pouvoir qui se donne de plus en plus les traits d'une monarchie à côté de laquelle celle de Tonton 1er finira par faire pâle figure...

Tout cela donne à la victoire de cet homme un autre sens que celui qu'on veut nous présenter (les Français auraient donné un signe fort de leur volonté de "changement"!), mais ce qui est fait est fait et il n'est pas question de revenir sur les résultats du vote populaire, même s'il est évident que la manipulation a été grandiose ; comme Chirac qui au lendemain de son élection de 2002 oublie qu'il a été élu grâce à ceux qui ne voulaient pas de lui... Voilà ce que m'inspire ce que j'ai vu, entendu et lu aujourd'hui. Encore n'en sommes-nous qu'au deuxième jour de l'ère Sarkozy !

En tout cas, concernant la larme démagogique à la lecture de la fameuse lettre de Guy Moquet, un petit commentaire. Les instituteurs et professeurs de France n'ont pas attendu le petit Nicolas pour faire connaître ce texte à leurs élèves. Non pas la larme démagogique d'un jour de celui qui veut se faire aimer des Français (chantons tous : "Sarkozy, nous voilà !" sur un air connu), mais le travail pédagogique de femmes et d'hommes qui ne visent que la liberté de conscience des enfants qu'on leur confie. Ces instituteurs et professeurs se sont d'ailleurs vu quelquefois intenter des procès ès idéologie par les bourgeois de France, parce qu'ils expliquaient que Guy Moquet était un jeune communiste, fils d'un communiste condamné par cette France qui a dû à Affiche_RougeLouis Aragon de connaître le courage de ceux dont les noms figuraient en lettres de sang sur L'affiche rouge. Ces noms aux consonances étrangères étaient ceux de membres de la Main d'œuvre Ouvrière Immigrée, la fameuse MOI organisée par le parti communiste français dans le cadre de la résistance. Des résistants présentés comme des immigrés criminels par la France envahie !
Le poème d'Aragon commence par ces mots : "Vous n'avez réclamé la gloire ni les larmes"... Alors, petit Nicolas qui se voit grand, ravalez votre larme qui coule comme une injure ! Écoutez plutôt Léo Ferré chanter !

Et puisque vous célébrez l'esprit de résistance, attendez-vous à ce que votre souhait soit entendu au delà de vos espérances : nous serons des milliers à résister à l'invasion ultralibérale que vous êtes en train de préparer et ma chronique de la révolte tranquille est, je l'espère, une infime gouttelette de cet océan qui va bientôt submerger notre pays.


17 mai 2007

Un philosophe peut-il se faire apôtre inconditionnel du politique ?

bogdanHier soir je me suis invité au lancement du festival Wazemmes l'Accordéon, où j'ai retrouvé mon collègue en musique Bogdan Nesterenko (photo), super accordéoniste qui vous fait chavirer avec une fugue du baroque allemand, un concerto pour violon du baroque italien aussi bien qu'avec une danse ukrainienne ! De retour à la maison, j'ai regardé l'émission de France3, Ce soir ou jamais, où débattaient quelques penseurs sur la question de l'héritage 68 (La fin de mai 68 ?) autour de Frédéric Taddeï. Parmi les débatteurs, beaucoup de gens intelligents et cultivés, comme Edwy Plenel, Daniel Linderberg, Philippe Corcuff, Jean Monod... Les écouter échanger fut un réel plaisir de l'esprit. Le problème, dans la partie d'émission que j'ai regardée (j'attends que le podcast soit disponible pour tout voir), ce fut l'intervention d'un certain Thierry Wolton, que je ne connaissais pas et qui se présentait comme "philosophe"...
68 Quelle ne fut pas ma surprise d'entendre dans la bouche du soi-disant philosophe ni plus ni moins qu'un plaidoyer pour Nicolas Sarkozy, singeant la rhétorique qui a fait la victoire de ce dernier aux dernières élections. Moi qui suis sensible à la roublardise rhétorique en général, à celle que déploie la droite française depuis quelque temps en particulier (notamment la figure rhétorique de l'envers et la figure rhétorique du retournement), j'ai été littéralement interpelé par le discours de ce philosophe.
Il me semblait en effet que, pour schématiser, le philosophe avait au minimum une double mission en ce bas monde :

  • la première est de tenter de comprendre le fonctionnement du monde précisément ; ainsi les premières théories reconnues comme philosophiques (dites présocratiques) ont-elles consisté en des systèmes cosmologiques qui voulait exhiber le principe du monde organisé (le "cosmos") : selon l'un c'était l'eau qui était à l'origine du cosmos, selon un autre c'était l'air, etc. - sachant que le fonctionnement du monde n'est pas que physique mais aussi social (et là Rousseau, Marx et d'autres ont construit des systèmes qu'on appellera sociologiques, bien qu'ils ne ressortent pas que de la sociologie mais de l'ensemble des "sciences sociales") ; 

  • la seconde mission est de décrypter le langage des hommes, de dénoncer et déjouer les pièges du langage ; ainsi la première grande philosophie (Platon) se construit-elle en contestation de la rhétorique, qui, selon le philosophe athénien, ne s'intéresse pas aux valeurs humaines par excellence que sont le vrai et le juste mais seulement à l'efficacité de la conviction de la foule ; la rhétorique qu'a connu et discuté Platon correspond, à notre époque, à ce qu'on appelle le marketing dans sa dimension communicationnelle - y compris le marketing politique.   

Dans les années trente déjà, lors de la montée du National-Socialisme hitlérien, un homme avait expliqué - pour la dénoncer - la puissance de la rhétorique dans son usage de marketing politique, ce qui à l'époque s'appelait "propagande politique". Il s'agit de Serge TCHAKHOTINE avec son ouvrage Le viol des foules par la propagande politique où les procédés hitlériens de communication persuasive sont passés au crible. Censuré par les autorités françaises en 1939 (qui ne voulaient pas déplaire au très cher Adolf), l'ouvrage est carrément détruit par les Allemands en 1940... Gallimard en publiera une nouvelle édition - augmentée - en 1952. Jacques ELLUL en fera une intéressante recension pour la Revue française de science politique (1953, vol.3, n°2, p.416-418) et Etienne ANTONELLI pour la Revue économique (1954, vol.5, n°4, p.649-652). Certes le fond scientifique sur lequel fonctionne la démonstration de Tchakhotine est daté (Pavlov, etc.). Reste le trouble qu'on peut resentir à lire ses pages et, dans le même temps, à entendre les hommes politiques d'aujourd'hui... Voir à ce sujet le remarquable travail de décryptage de Jean-Luc PORQUET, journaliste au Canard Enchaîné... Bref, les hommes politiques d'aujourd'hui nous assène des coups d'une technicité d'une redoutable efficacité : c'est la même technique qui permet à un fabriquant d'armes de nous convaincre qu'en achetant une arme on œuvre pour la paix, et qui va convaincre les Français de mettre en situation de commandement suprême quelqu'un qui ne peut que vouloir leur exploitation économique... La servitude volontaire comme disait La Boétie, a ses raisons que l'art de la propagande politique ne connaît que trop bien !

Qu'on me comprenne bien : il ne s'agit pas pour moi de prétendre qu'un philosophe qui prône le nationalisme ou le libéralisme soit philosophiquement en faute. Ce que j'abhorre se situe au niveau de la procédure langagière et donc dans la relation entre le philosophe et celui qui l'écoute - c'est-à-dire dans le dialogue philosophique (encore Platon !) -, et non au niveau des valeurs morales et politiques positivement véhiculées par le discours. J'ai travaillé, quand j'étais étudiant philosophe à la Sorbonne, dans les années soixante-dix, avec des professeurs qui construisaient la philosophie politique à partir de la distinction « entre ce qui m'appartient / ce qui appartient à l'autre », à partir du sentiment et de la réalité de la propriété (je me souviens de Raymond  Polin, philosophe "libéral"). Non, il s'agit bien pour moi de faire la distinction entre le dialogue philosophique et la communication mercatique : du point de vue formel, le marketing en général fonctionne sur un principe d'efficacité qui mesure la qualité de son fonctionnement à l'aune du nombre de couillons pris dans ses filets et ce quel que soit la "valeur" ou l'"objet" mis en avant (éternel question de la technique a priori moralement neutre et de la qualité morale de l'usage qu'on en fait). On comprendra dès lors qu'un philosophe, un vrai, un honnête, ne peut jouer ce jeu-là. Or c'est ce qu'a fait notre philosophe d'hier soir, Thierry Wolton. Il n'a cessé de redire les "arguments" du National-Libéralisme d'aujourd'hui, il n'a cessé de vendre les qualités de "chef d'entreprise" de son Dieu vivant... Il n'a cessé de se comporter en bouffon qui se donne l'air d'un philosophe, tel un Rosenberg ou un Krieck. Il était philosophiquement aussi crédible que Sarkozy était politiquement crédible en citant - c'est-à-dire s'appropriant (dans l'usage marketing) - Jaurès ! Quand je vois l'étiquette "philosophe" si malmenée, c'est plus fort que moi et je ne peux que me révolter.

Qu'un "bourgeois" se laisse prendre dans les filets du langage de propagande, tant pis ! Mais un philosophe, c'est un parjure d'une extrême gravité ! Comme si un médecin ne secourait pas spontanément et inconditionnellement le mourant, malgré le serment d'Hippocrate. Ce philosophe-là me fait remémorer une anecdote de mon adolescence : mon père me disait, quand j'étais collégien, qu'il était ouvrier lui aussi parce qu'il travaillait de ses mains (il était architecte) - au moment même où le maire du XIX° arrondissement de Paris me jurait qu'il n'y avait pas lutte des classes (j'étais allé le voir avec deux autres collégiens de ma classe pour les besoins d'un exposé sur les institutions républicaines - c'était à la fin des années soixante), et ce tout juste quelques années avant que mon père, encore lui, ne me "déconseille" de lire La condition ouvrière de Simone Weil, non parce que le livre était mauvais et qu'il avait pu lui-même en juger pour l'avoir lu, mais tout simplement à cause du titre - qui était forcément séditieux puisque la lutte des classes n'existait pas (en réalité, je pense qu'il avait peur que je découvre qu'il n'était pas ouvrier comme il me l'avait affirmé...). Aujourd'hui, en écoutant notre philosophe national-libéral, me reviens en oreille le son des voix qui faisaient autorité dans mes années collège, aux environs de 1968...

J'ai bien sûr très vite lu Simone Weil, de La condition ouvrière à La pesanteur et la grâce !


12 mai 2007

EsclavageS

Hier, vendredi 11 mai, à la fois jour comme les autres et lendemain de la commémoration de l'abolition de l'esclavage,  La Voix de Nord faisait le haut de sa page 15 avec deux informations très apparentées sur le fond comme parfois sur la forme : protestations contre le sort fait quotidiennement aux salariés et marche pacifique contre l'esclavage contemporain...

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OITC'est le jour de la commémoration de l'abolition de l'esclavage que l'OIT, qui n'est pas vraiment une organisation gauchiste, publie son Rapport global en vertu du suivi de la Déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail, où l'inégalité du rapport de force entre employeurs et salariés est criant d'injustice fondamentale.

On a là de beaux exemples de la permanence des pratiques économiques mangeuses de vies humaines, casseuses de corps et broyeuses de libertés...

Leurs profits valent-ils vraiment plus que nos vies ? Visiblement la majorité des électeurs français viennent de répondre oui à cette bonne question... Les marchands d'esclaves ont encore de belles années devant eux... des années efficaces !
 


9 mai 2007

Amalgame policier

Il fallait s'y attendre, car la "ruse" est classique et a déjà maintes fois fait ses preuves : pour éliminer la révolte juste, vous mêlez quelques casseurs (ou vous faites tout pour qu'il s'en mêlent) à une manifestation pacifique de protestation citoyenne, vous laissez faire un peu de casse, et vous ramassez la mise, casseurs et non-casseurs dans le même panier à salade, dans le même sac, comme dit


mots-clés :
provocation policière, protestation citoyenne


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