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BRICH59
29 mai 2006

VAE, vae victis

Intéressant, ce qui s'est dit à Limoges la semaine dernière lors du colloque interdisciplinaire intitulé « Validation des Acquis de l’Expérience (V.A.E.) et reconnaissance », organisé par le GRESOC (Groupe de Recherches Sociologiques) de l’Université locale.

La loi de modernisation sociale de janvier 2002, en instituant la VAE, a étendu le champ de la validation des acquis, jusqu’à en faire une voie spécifique de certification, mais a aussi donné une nouvelle visibilité à ces pratiques. Dans le cadre de la promotion de ce dispositif, qui s’inscrit dans le cadre plus large des politiques d’éducation tout au long de la vie, de nombreuses rencontres ont été organisées à destination des praticiens. Mais la VAE peut être également constituée en objet scientifique, et intéresse à ce titre plusieurs disciplines. La thématique de la reconnaissance pourra précisément permettre une confrontation large entre juristes, philosophes, économistes, psychologues, sociolo- gues, historiens et spécialistes des sciences de l’éducation.

Tel était l'argument de cette manifestation dont la thématique était distribuée ainsi :

  • La Validation des acquis : regards croisés sur une reconnaissance
  • L’expérience, source de reconnaissance ?
  • D’autres formes de reconnaissance de l’expérience ?
  • La VAE : quelles reconnaissances institutionnelles ?
  • Perceptions individuelles, représentations sociales ?
  • Reconnaissance et déni de reconnaissance

Pour davantage de détails sur l'organisation de ces journées, lisez donc le programme !
Moi, je ne me suis pas rendu à Limoges la semaine dernière. J'ai juste suivi ce qui s'y est dit par personnes interposées, par personnes auto-médiatisées. Et je n'en retiens que deux idées-forces que je me permets de développer un peu.

Tout d'abord, le risque de « déni de la formation professionnelle » de la part des financeurs par simple calcul  « économique » : le congé VAE étant a priori plus court et (donc) moins cher qu'un congé formation (on aurait en effet déjà vu un FONGECIF pratiquer ce genre de calcul). Quand je vous dis que la soumission de la formation des hommes et des femmes à la logique libérale et marchande finira par avoir raison de ses justifications sociales et simplement humaines !

Ensuite, le risque de survalorisation du risque de déqualification des « savoirs académiques », c'est-à-dire, quand il s'agit de demande de diplômes de niveaux III et supérieurs, dispensés par l’Université avec un grand U : si des savoirs informels issus de l’expérience professionnelle peuvent donner lieu à diplôme, par conversion en savoirs académiques, où va-t-on !  En d'autres termes, il y a un risque réel de diabolisation de la VAE par les dispensateurs des diplômes et surtout des formations qui y préparent, par simple calcul de prestige, d'image, de pouvoir social.
D'abord il y a cette impossible perturbation : pourquoi en effet la VAE viendrait-elle perturber ce rapport de force immémorial entre l'ensei- gnant et l'élève ? Au nom de quelle doctrine sociale à laquelle consen- tiraient les enseignants ? Encore dans le système classique, l'élève est-il sous le joug pendant un temps compté et l'élève qui réussit à supporter le joug jusqu'au bout se voit-il délivrer le droit de devenir enseignant à son tour... Ce type de schéma ne peut pas ne pas nous faire penser à l'Homo Academicus de Pierre Bourdieu (Editions de Minuit, 1984), où l'on observe bien ces universitaires notables qui, pour reproduire un système dont ils détiennent enfin les clés, font endurer aux autres ce qu'ils ont enduré eux-mêmes... Malheur à eux ! Pas de pitié pour les non-diplômés ! Malheur aux vaincus !
Et puis il y a ce paradoxe qui consiste à contester à l'Université et à l'École le monopole de la production du savoir (la VAE présente en elle-même une telle contestation) tout en leur demandant de reconnaître des savoirs produits en dehors d’elles à des fins de validation !

Bref, voyant fonctionner la VAE autour de moi, j'ai repéré des comportements assez typiques de ces enseignants accrochés à leur pouvoir dispensateur de savoirs académiques et octroyeur de titres universitaires. J'ai ainsi vu des projets de qualification brisés par le simple soupir égocentrique d'un enseignant-chercheur. J'ai vu des stigmatisations à l'emporte-pièces casser des velléités de reprise d'études supérieures via la VAE. J'ai vu des enseignants refuser d'accompagner des candidats pour des raisons étrangères à la formation, à la qualification, voire à l'Université elle-même, sans même un regard vers l'autre, mais tout en tenant des discours intelligents, construits et ressassés sur la nécessité du respect du candidat, de la prise en compte de l'humanité de l'autre et de la force du projet pour lui-même et pour ce qu'il vise... Malheur à eux surtout ! Malheur aux vainqueurs ! [Et là, parce qu'il est des victoires qui résonnent comme des mises à mort, je crie : Victoire, où est ta mort ?]
Pour être tout à fait honnête, j'ai aussi vu fonctionner des jurys avec des postures d'authentique co-construction de la démarche de valida- tion, dans un sentiment de respect de l'autre et d'écoute participante pour reprendre l'expression qu'aime Bertrand Schwartz. Ouf !

...

Les actes du colloque devraient faire l’objet d’une publication d’ici fin 2006. J'attends de pouvoir les lire avec impatience !


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2 mai 2006

Belles de Mai à Tourcoing

Un message de Véronique Chabot


cueeptcgJe suis heureuse de vous annoncer la 9ème édition des Belles de Mai, manifestation culturelle du centre de Tourcoing, qui comme tous les ans, nous permet de présenter les diverses activités culturelles proposées dans le centre et de mettre en débat le pourquoi de leur existence dans nos actions de formation. Ce moment est très important pour les adultes en formation chez nous notamment ceux qui, tout au long de l'année, se sont investis dans nos ateliers culturels, mais aussi pour les artistes et partenaires qui se sont engagés auprès de nous et les équipes de formateurs et de permanents du centre.
Votre présence parmi nous à cette occasion représente une des rares occasions pour échanger autour de cette action dans un climat de créativité, de convivialité et de découverte.
Nous comptons donc sur votre présence les mardi 23 et mercredi 24 mai toute la journée.
Vous recevrez d'ici début mai, un programme complet de ces deux jours.

Je vous invite aussi à noter, les journées citoyennes du centre de Sallaumines, temps fort également pour le centre, organisé autour de rencontres, de présentation de productions d'ateliers, de débats, de projections de films..le programme là aussi se construit. Ces journées auront lieu les 28, 29 et 30 juin sur le thème "Voyage, voyages".

V é r o n i q u e     C H A B O T
Responsable des actions culturelles du CUEEP


20 mars 2006

Bertrand SCHWARTZ à l'honneur

Mon ami Serge y était... Il raconte

Le 6 mars à la Maison de l’Europe, à Paris, s’est tenu un hommage à la vie et l’œuvre de Bertrand Schwartz à l’occasion de la parution de 3 publications:

  • Un livre de Louise Lambrichs aux éditions Philippe Rey: L’invention sociale. A l’écoute de Bertrand Schwartz

  • Un coffret multimédia CD+DVD réalisé par Geneviève Auroi-Jaggi et produit par l’Université de Genève et la Télévision Suisse Romande :

    • le CD interactif intitulé L’œuvre de B.Schwartz : ses archives présente des documents inédits, des photos, textes, rapports, interviews, entretiens, conférences et enregistrements ainsi que des articles de presse qui témoignent des actions et des engagements de Bertrand de 1950 à nos jours.

    • le DVD Les grands entretiens : Bertrand Schwartz présente un entretien télévisé de 42 minutes où Bertrand livre le fruit de 40 ans d’actions et de réflexion.

  • Enfin, la revue Pour n° 189 - mars 2006 consacre son dossier à Bertrand sous le titre: "Construire une pensée collective pour l’action".

cd_bs_01_zoomBref, trois documents qui devraient avoir une place de choix dans les centres de documentation de la com- munauté éducative. Ne pre- nez pas tout ça pour un hommage posthume antici- pé. Pour les auteurs, le nombreux public assistant à la manifestation, ceux qui ont côtoyé ou côtoient encore Bertrand, il s’agit d’une étape, d’une somme de ressources enfin rassemblées pour nourrir l’action de ceux qui pensent que l’exclusion n’est pas une fatalité et que des moyens efficaces existent pour la combattre.
Nous avons très probablement l’occasion d‘avoir à Lille, en juin, une manifestation similaire à celle de Paris. Si tel est le cas, ne la manquez surtout pas.


14 février 2006

Promoting entrepreneurial mindsets...

Ce matin en arrivant au boulot, j'ai allumé mon ordi, actionné mes logiciels de surveillance de pages web... et je suis bien sûr tombé sur les documents de la Commission européenne parlant du fameux esprit d'entreprise, du très fameux business spirit...

press_releasesTout d'abord, le document destiné à la presse, intitulé La Commission présente un projet visant à promouvoir l’esprit d’entreprise dans les écoles et les universités, référencé IP/06/148 et effectivement daté du 13/02/2006, document dont noticia.info et l-aef rendaient compte - cf. mon message d'hier.
On peut lire en toutes lettres le lien avec les fameuses compétences clés.
On peut aussi constater le regret des commissaires devant la non prolifération de l'éducation à l'esprit d'entreprise, ce qui incite la commission à valoriser ce qui se fait déjà dans le genre, grâce à la fameuse tactique de la mise en avant des "bonnes pratiques en Europe". D'où cet autre document pour la presse, uniquement en anglais celui-là - comme pour que les handicapés linguistiques dans mon genre ne puissent comprendre.

memo0669

Sauf que grâce aux traducteurs en ligne, je vois bien que ce texte confirme mon ironie d'hier soir : on s'en prend aux petits, aux tout-petits ! Peut-être pas dès la crèche - on va laisser ce territoire à Nicolas collusionis rex -, mais dès le début de l'âge de la scolarité obligatoire... Ainsi la Young Inventors Competition britanique.

Si c'est pas de l'éducation=formatage, ça !
La force tranquille du libéralisme, c'est sa face cachée où il y a ça, entre autres !


13 février 2006

Esprit d'entreprise, es-tu là ?

gunterverheugenAujourd'hui la Commission européenne, par la bouche de Günter Verheugen, a mis les points sur les i : les systèmes éducatifs nationaux et régionaux sont priés de promouvoir comme il convient l'ESPRIT D'ENTREPRISE.
Alors que de l'autre côté de l'Atlantique, chez nos cousins de Montréal, et pour la cinquième année, on offre 1.500$ en bourse à de futurs entrepreneurs de 16 à 35 ans, pour "stimuler les aptitudes entreprenariales", à Bruxelles, on s'emploie également à une telle stimulation. Juste une exhortation !

Voici ce que j'ai lu tout à l'heure sur noticias.info :

noticiasLa Commission présente un projet visant à promouvoir l'esprit d'entreprise dans les écoles et les universités.
Pour réussir à préserver son modèle social, l'Europe a besoin d'une plus forte croissance économique, de créations d’entreprises plus nombreuses, d'un plus grand nombre d'entrepreneurs prêts à se lancer dans des projets innovateurs et de PME à forte croissance. Aujourd'hui, la Commission européenne a présenté les grandes lignes de plusieurs recommandations visant à renforcer le rôle de l'éducation dans l'instauration d'une culture plus entrepreneuriale dans les sociétés européennes. L'enseignement scolaire devrait, très tôt, sensibiliser les jeunes à l'esprit d'entreprise comme option pour l'avenir, leur donner les moyens de développer des compétences entrepreneuriales de base, les aider à être plus créatifs et à avoir plus confiance en eux dans ce qu'ils entreprennent. A un stade ultérieur, les universités et les instituts techniques devraient intégrer l'esprit d'entreprise, comme une composante importante du cursus, en le diffusant dans différentes matières, et inviter ou encourager les étudiants à assister à des cours d'entrepreneuriat. Cette initiative s'inscrit dans le partenariat de Lisbonne pour la croissance et l'emploi.

Ce matin L'AEF était sur le même diapason (dépêche n° 61347) :

aef"Nous avons besoin d'une approche systématique de l'éducation à l'entrepreneuriat, de l'école primaire à l'université", déclare Günter Verheugen, commissaire européen chargé de l'industrie et des entreprises, à l'occasion de la présentation de ses recommandations visant à promouvoir l'esprit d'entreprise dans les écoles et universités, aujourd'hui lundi 13 février 2006. "Si l'Europe souhaite que son modèle social se maintienne, elle a besoin d'une plus grande croissance économique, de plus de nouvelles entreprises, de davantage d'entrepreneurs innovants et d'un plus grand nombre de PME à haut potentiel de croissance", rappelle la Commission européenne.

La démonstration est limpide. Et je suis tellement convaincu, que je propose qu'on inculque ce bel esprit d'entreprise chez les petits en même temps qu'on repère les mauvaises graines à la crèche, comme il en est question dans les papiers de la place Bauveau.
La démonstration est limpide. Sauf que je ne vois pas bien ce que peut être ce "modèle social" européen - qui constitue le point de départ de la démonstration du commissaire ! Le modèle auquel une majorité d'électeurs français ont dit NON! en mai dernier ? Ou bien l'un des modèles nationaux ?

lemonde_fitoussiCe qui nous renvoie à l'article de Fitoussi dans Le Monde daté de demain, où l'on se plaint de l'assourdissant silence de l'Europe au sujet de l'absence de cohérence interne des différents modèles qui fonctionnent en Europe...

Bref, le principal, comme dirait Monsieur le Baron qui doit jubiler en entendant tout ça, c'est qu'on promeuve l'esprit d'entreprise - auquel Madame du Medef est si attachée !

C'est quoi au juste, l'esprit d'entreprise ?


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3 février 2006

auto-hétéro

novalis_romantisePour mes amis et anciennes connaissances qui travaillent au développement de la recherche sur l'autoformation, juste une citation de Novalis dont je viens de terminer les notes publiées en français sous le titre Le monde doit être romantisé :

La sollicitation extérieure
n'est qu'un manque d'auto-hétérogénéisation
et de contact avec soi-même.!!!!!

['Sollicitation' est en français dans le texte. Le reste de la phrase est traduit de l'allemand (Olivier Schefer, aux éditions Allia)]


30 janvier 2006

L'esprit d'entreprise s'enseigne-t-il ?

Il y a quelques messages, dans ma série "De l'esprit d'entreprise", je demandais si cet esprit-là s'enseignait. ath_platPosant cette insidieuse question, mon cortex réactivait mes souvenirs de lecture d'apprenti philosophe découvrant les dialogues de ce bon Platon, notamment celui (le Ménon) où Socrate l'insidieux travaillait cette belle question : "la vertu est-elle à même d'être enseignée"...
Fidèle à la méthode socratesque, méthode de la prudence philosophique, j'avais commencé par tenter d'éclaircir ce dont on parle quand on dit "esprit d'entreprise"...

E-sérendipité oblige, je suis tombé sur un blog dont le sujet semble être ce fameux esprit d'entreprise, notamment dans ses dimensions éducatives et pédagogiques : je veux parler du blog d'ellenika, à moins qu'il faille écrire Ελληνικά - ce qui nous rapproche de Socrate et Platon. Ce blog s'ouvre avec ces mots :

ellenikaPeut-on former à « l'esprit d'entreprise » ? Depuis 20 ans, l'U.E. soutient des projets favorisant l'esprit d'entreprise (le goût d'entreprendre) dans les établissements d'enseignement. Est-ce une remise en cause des fonctions ordinaires de l'Éducation Nationale ? Quels sont la signification et les enjeux d'un tel projet ? Ce sont là les quelques questions posées dans la thèse de doctorat en sciences de l'éducation.

Ouvert en octobre dernier, ce blog, muet depuis le 2 décembre, est prometteur. Ce serait sympa qu'Ελληνικά se présente plus avant et nous livre ses réflexions éclairantes...


20 janvier 2006

De l'esprit d'entreprise (5)

suite de ...

Plusieurs remarques (très personnelles) s'imposent.


Stratégie européenne pour l'emploi

La stratégie institue une coordination permanente des politiques de l'emploi des États membres par les lignes directrices pour l'emploi, qui sont rassemblées en quatre thèmes communs ou piliers:

  • Aptitude à l'emploi - Aider aussi bien les travailleurs que les sans-emploi à développer les compétences adéquates.

  • Esprit d'entreprise - Faciliter le démarrage et la gestion d'une entreprise, et permettre d'y employer plus facilement du personnel.

  • Adaptabilité - Élaborer de nouvelles compétences et façons de travailler dans un monde en mutation rapide.

  • Égalité des chances - Égalité d'accès à l'emploi pour chacun, aider à concilier vie professionnelle et familiale

Le cycle annuel de mise en oeuvre et de suivi des politiques nationales de l'emploi a été baptisé "processus de Luxembourg", car c'est au sommet sur l'emploi de Luxembourg en 1997 que les procédures ont été adoptées.


La panoplie des compétences clés a pour fonction de systématiser, de recentrer des énumérations de compétences existantes ici ou là, de redire, de façon plus serrée, à un endroit topique (quelque chose comme une base universelle et incontestable de discussion) ce qui se dit déjà dans l'éparpillement d'ailleurs identifiés...
Le tout sur un ton hyper-prescriptif : cf. "La recommandation proposée définit les compétences clés nécessaires à tous les citoyens dans l'économie et la société basées sur la connaissance. Elle reconnaît qu'il est préférable que les dispositions d'application soient prises au niveau national, régional et/ou local. Elle appelle les États membres à veiller à ce que tous les élèves aient acquis les compétences clés au terme de la période obligatoire d’enseignement et de formation et les encourage, à la lumière des critères de référence européens, à lutter contre les inégalités dans l’éducation. S'agissant des adultes, la recommandation appelle à la création d'importantes infrastructures en collaboration avec toutes les parties prenantes."


L'intégration de l'apprendre à apprendre montrerait qu'on parle en fait des compétences qui font l'autonomie de la personne... mais cf. ce qui suit au sujet de l'esprit d'entreprise.


Quand la commission ajoute à la panoplie l'esprit d'entreprise (ajout datant du Conseil de Lisbonne), il est légitime d'y voir une percée du discours libéral [esprit d'entreprise -> liberté d'entreprendre -> libéralisme], qui tente par tous les moyens de faire porter aux individus exclus ou en difficultés sociales la responsabilité de leur exclusion ou de leurs difficultés... Ce qui n'empêche pas (ou d'autant plus) que les gens de la Commission reconnaissent que "les personnes faiblement qualifiées sont moins susceptibles de participer à des formations" et qu'il est "donc plus difficile d'aider ceux qui en ont le plus besoin".


Il y aurait à gloser sur l'idée que l'esprit d'entreprise serait une "nouvelle compétence nécessaire dans une société de la connaissance"... ; souvenons-nous d'une certaine phrase de premier ministre français d'il y a trente ans !


Plus sérieusement, cf. les textes de Christian Laval, auteur de L’école n’est pas une entreprise (La Découverte, Paris, 2003) notamment, mais aussi d'une contribution dans Le Monde Diplomatique...


Les compétences clés se comprennent bien - même si cela n'est pas toujours explicite - en termes de "besoins professionnels", besoins pour le (bon) fonctionnement de l'économie européenne, l'éducation devant travailler (prioritairement ?) à la satisfaction de ces besoins. Vieux débats...


En termes de modèle socio-anthropologique, on est encore dans un humanisme à la Bertrand Schwartz, d'une part par le parti pris affiché de maintenir la globalité (cf. par exemple lorsque la Commission affirme que les inégalités dans l’éducation résultent souvent de la conjonction de circonstances personnelles, sociales, culturelles et économiques, et doivent être abordées en collaboration avec d'autres secteurs), d'autre part par la mise en avant de la finalité citoyenne et autonomisante de l'éducation.


Côté réalisation formation, un chantier pédagogique et d'ingénierie sur la base d'un tel échaffaudage conceptuel (pas forcément stable intrinsèquement) appelle une pratique serrée de large partenariat régional au sens large (y compris transfrontalier - cf. dynamique type EQUAL), mais aussi intersectoriel (formation continue + formation initiale + travail social + SPE + etc.).


18 janvier 2006

De l'esprit d'entreprise, enfin ! (4)

suite de...

Parmi les huits compétences pointées par les experts européens, il en est une qui est au plus haut point intéressante : l'esprit d'entreprise.


Ce que dit la proposition de nov.2005
Définition

L’esprit d’entreprise se réfère à l’aptitude d’un individu à passer des idées aux actes. Il suppose de la créativité, de l’innovation et une prise de risques, ainsi que la capacité de programmer et de gérer des projets en vue de la réalisation d’objectifs. Cette compétence est un atout pour tout le monde dans la vie de tous les jours, à la maison et en société, pour les salariés conscients du contexte dans lequel s'inscrit leur travail et en mesure de saisir les occasions qui se présentent, et elle est le ferment de l’acquisition de qualifications et de connaissances plus spécifiques dont ont besoin les chefs d’entreprise qui créent une activité sociale ou commerciale.


Connaissances, aptitudes et attitudes essentielles
correspondant à cette compétence

La connaissance à avoir est celle des possibilités offertes aux fins d’activités privées, professionnelles et/ou commerciales, y compris d’aspects "de plus grande ampleur" qui sont révélateurs du contexte dans lequel des personnes vivent et travaillent, comme une compréhension générale des mécanismes de l’économie. Il s’agit également de la connaissance des possibilités offertes à un employeur ou à une organisation et des enjeux que ceux-ci doivent relever. Les individus devraient être au fait de la position éthique des entreprises, et de la manière pour elles de servir d’exemple en menant une activité commerciale honnête ou en étant une entreprise sociale.

Les aptitudes relèvent d’une gestion anticipative (planification, organi- sation, gestion, gestion de groupes et délégation, analyse, communication, compte rendu et évaluation et rapport), et de la capacité à travailler isolément ou en équipes. Il s’agit de l’aptitude à identifier ses points forts et ses faiblesses, et à évaluer et à prendre des risques jugés utiles.

Un esprit d’entreprise se caractérise par une disposition à prendre des initiatives, à anticiper, à être indépendant et novateur dans la vie privée et en société, autant qu’au travail. Il implique aussi motivation et détermination au travail et/ou dans la réalisation d’objectifs, qu’il s’agisse d’objectifs personnels ou de buts collectifs.



Ce qu'on peut en dire

Mis en avant comme compétence de base, il semble que l'"esprit d'entreprise" date du Conseil de Lisbonne. Mais il était déjà là, comme pilier de la politique emploi européenne...

De quoi on parle ?

Les Canadiens constatent que, "aujourd'hui, dans la plupart des pays de l'OCDE, on valorise l'esprit d'entreprise et la responsabilité personnelle. Les adultes sont censés être souples, ouverts, novateurs, créatifs, autonomes et motivés et assumer la responsabilité de leurs décisions et de leurs actes à titre d'apprentis, de travailleurs, de citoyens, de membres d'une famille ou de consommateurs". Il est vrai qu'on en parle beaucoup : environ 386.000 occurrences pour "esprit d'entreprise" sur la toile telle que visitée par Google le 12 décembre 2005...

Pour Bruno PONSON et Jean Louis SCHAAN (L'esprit d'entreprise. Aspects managériaux dans le monde francophone, 1993), "l’esprit d’entreprise, c’est générer les innovations et avoir la volonté de les voir aboutir". Pour Pierre André JULIEN et Michel MARCHESNAY (L'entrepreneuriat, 1996), "l’esprit d’entreprise peut être défini comme l’aptitude d’un individu, d’un groupe social, d’une communauté à prendre des risques pour engager des capitaux (pour investir, voire s’investir) dans une sorte d’aventure (« une entreprise »), consistant à apporter quelque chose de neuf (l’innovation), de créatif, ceci en employant et en combinant de la façon la plus performante possible des ressources diverses".

Claude Thélot (devant les députés, audition du 17 mars 2004) envisage "l'esprit d'entreprise, au sens large". Il précise que l'expression "peut prêter à confusion. Il y a un courant de pensée, dit-il, qui voit ces mots et qui se dit "globalisation", "marchandisation", ou même "américanisation". Je pense qu’il n’en est rien. Et il suffit de voir la définition de l’esprit d’entreprise qui a été donnée par la table ronde d’industriels européens, qui sont les grandes industries européennes, type Renault, Saint-Gobain, Suez. Et dont les intérêts sont clairement centrés sur la compétitivité. Je vais vous lire comment ils ont défini l’esprit d’entreprise dans un document qu’ils ont adressé aux chefs d’États et de gouvernements. Ils ont dit que même s’il est clair que l’Europe a besoin de plus d’entrepreneurs, l’esprit d’entreprise se définit comme le développement d’une capacité de créativité, d’innovation, de flexibilité, de travail en équipe et de curiosité intellectuelle. Alors on peut se demander si c’est vraiment ça l’esprit d’entreprise, mais on peut difficilement dire, je crois, qu’on veut s’opposer au développement de ces capacités chez les jeunes ou même chez les moins jeunes. Donc, esprit d’entreprise au sens large: pas la nécessité d’être un entrepreneur mais un sens de l’entreprise."

C'est en 1997 que l’Europe a défini les quatre piliers suivants de stratégie européenne pour l’emploi: l'employabilité, l'esprit d’entreprise, l'adaptabilité et l'égalité des chances, le FSE étant l’instrument financier de sa mise en oeuvre.... Du point de vue de la politique européenne de l'emploi, l'esprit d'entreprise, c'est "faciliter le démarrage et la gestion d'une entreprise, et permettre d'y employer plus facilement du personnel"...

Janvier 2003, la Commission présente son Livre vert L'esprit d'entreprise en Europe. Incitant l'Europe à relever ce "défi" qu'est l'esprit d'entreprise, ce document met en perspective une coordination des politiques en faveur de l'esprit d'entreprise et souhaite un engagement sur "trois axes d'action pour une société favorable à l'entreprise" : élimination des obstacles au développement et à la croissance des entreprises, recherche d'un équilibre stable et viable entre le risque et la rétribution de l’entrepreneur et valorisation de l'esprit d'entreprise dans l'Europe élargie...

L'esprit d'entreprise s'enseigne-t-il ?

"Peut-on apprendre l’esprit d’entreprise ?", demandent Ponson et Schaan. "Sans doute non, mais peut-être le révéler ou le renforcer là où il existe", répondent-ils aussitôt.

Et une des façons notoires de "le renforcer là où il existe", voire de "le révéler", c'est sûrement de favoriser son partage. L'esprit d'entreprise, c'est comme la bonne parole, comme la flamme de l'Esprit sur la tête des apôtres au quarantième jour après la Passion : ça se partage, ça se propage, ça contamine... De toutes les façons, ça se diffuse : la première des missions de l'APCE française (Agence Pour la Création d’Entreprises) n'est-elle pas précisément d'"assurer la diffusion de l’esprit d’entreprise" ? L'esprit d'entreprise est un vent qui sait porter l'innovation : l'un des principaux objectifs de l'eEurope n'est-il pas d'"introduire en Europe une culture numérique soutenue par un esprit d'entreprise favorable au financement et au développement de nouvelles idées" (document fondateur de 1999) ? Élargissant le cercle territorial, on peut aller voir les missions de la Jeune Chambre Internationale, fédération mondiale de jeunes professionnels et chefs d'entreprise, âgés de 18 à 40 ans, dont la mission est de "contribuer au progrès de la communauté globale en offrant aux jeunes les moyens de développer les aptitudes à diriger, la responsabilité sociale, les contacts amicaux et l'esprit d'entreprise, nécessaires pour créer un changement positif"...

Bref, l'esprit d'entreprise, ça souffle, ça se souffle, mais ça ne s'apprend pas ! Sauf que, un peu partout en Europe, il y a plein d'expériences pédagogiques centrées sur l'objectif de son développement, voire de son acquisition... et qu'aujourd'hui la Commission inscrit l'esprit d'entreprise comme compétence de base à acquérir dans l'enseignement obligatoire initial et à entretenir (voire acquérir si ce n'est déjà fait) dans le cadre élargi de l'éducation permanente. Il y a trois ans le livre vert sur l'esprit d'entreprise en Europe affirmait que "l'éducation et la formation devraient contribuer à promouvoir l'esprit d'entreprise en stimulant les mentalités, la prise de conscience des opportunités de carrière en tant qu'entrepreneur et les compétences." L'une des dernières questions que posent le livre vert se formule ainsi : "Comment l'éducation peut-elle contribuer à sensibiliser davantage et à fournir les outils nécessaires au développement d’attitudes et de compétences entrepreneuriales (enseigne- ment de l'esprit d'entreprise à l'école, témoignages d'entrepreneurs dans les écoles, stages auprès d'entrepreneurs expérimentés, extension de la formation entrepreneuriale à l'université, davantage de filières en commerce et gestion (de type MBA), adéquation entre la formation à l'esprit d'entreprise et les programmes de recherche publics)?"...


Déjà expérimenté

Il existe une "agence polonaise pour le développement de l'esprit d'entreprise" - Pologne où "la ZRP [= Chambre polonaise des métiers] coopère avec le ministère de l'éducation nationale pour créer les conditions adéquates d'une éducation à l'esprit d'entreprise."

En Allemagne (Projet pédagogique "Atelier d'avenir"  / DGB - le monde de l'apprentissage pour l'orientation professionnelle), "une cyber-formation favorise l'acquisition de qualifications essentielles pour la vie professionnelle, comme l'esprit d'entreprise et les compétences en communication."

En Allemagne, "Apprendre tout au long de la vie implique d’encourager la collaboration entre les organismes de formation et les entreprises. Ces partenariats doivent intensifier le contact des élèves et des enseignants avec le monde du travail à travers des stages en entreprises pour les élèves et des offres de formation continue pour les professeurs sur les thèmes du monde du travail. Dans ce contexte, les contenus de formations se centrent sur la capacité à communiquer, la maîtrise des médias, l’esprit d’entreprise et l’ouverture sur le monde (acquisition de connaissances en langues étrangères, séjours à l’étranger, coopération transfrontalière). Dans le système dual de la formation professionnelle initiale, les règlements de formation pour la partie en entreprise (législation fédérale) et le programme pour la partie de la formation en établissement de formation (législation des Länder) intègrent ces nouvelles exigences."

Au Danemark : "un programme d’action pour développer l’esprit d’entreprise à travers tout le système scolaire (de l’école élémentaire jusqu’à l’enseignement supérieur) valorisant les qualités personnelles de courage et d’initiative, la culture d’innovation liée à l’usage des nouvelles technologies et au travail en réseau, et abordant les matières nécessaires au développement d’une activité."

En Slovénie, "outre l'amélioration des connaissances professionnelles, les partenaires sociaux ont mené à bien activement plusieurs programmes de formation à l'esprit d'entreprise pour les salariés, les jeunes et les chômeurs, en vue d'améliorer la compétitivité et la réussite des entreprises."

En France, sans parler des intrusions répétées des organisations patronales dans l'école (il suffit de lire Le Monde Diplomatique pour en être informé), on a http://www.pme.gouv.fr/espritdentreprise/index.php qui nous enjoint : « Libérez votre esprit d'entreprise ! », comme s'il s'agissait d'une pulsion naturelle qu'il s'agirait de laisser agir, la loi ayant cet office-là  !

à suivre


17 janvier 2006

Rapid elearning

Le rapid elearning consiste à transformer et diffuser rapidement du contenu existant (par exemple un cours en Powerpoint) sous forme multimédia, grâce à des outils variés caractérisés par leur simplicité d'utilisation et malgré son nom ne s'applique pas seulement au elearning. Éric Delcroix en parlait déjà l'an dernier...
Cette année, Éric nous organise trois conférences sur le sujet
Ce sera le

vendredi 20 janvier de 14 à 17 h
au C2RP, Immeuble Le Vendôme
50, rue Gustave Delory - 59800 LILLE
.

Trois conférences offertes dans la cadre du projet des étudiants du Master IDEMM de Lille 3 (UFR IDIST) : la création d'un site dédié au Rapid elearning.

Lpub_carrees intervenants sont:

Le tout sera animé par Eric Delcroix ‹ Les zed

Grâce à Speechi live les conférences seront diffusées gratuitement en direct sur Internet (présentation et audio avec une possibilité d'interrogation à distance) et également en MP3 Live.

Dans la soirée, les bloggers et les non bloggers qui désirent découvrir la blogosphère se retrouveront dès 19 h au Pain Quotidien (35, place Rihour 59000 Lille) pour des échanges variés et non dirigés

Pour plus d'informations sur blog en nord, cliquez ou écrivez à cette adresse.

Cette nouvelle reprend un message d'Éric Delcroix


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