Lecture du sondage
IFOP du 23 mai 2006...
« En
dépit des récents mouvements sociaux puis du retrait du
Contrat Première Embauche, les Français, à
travers la dernière enquête IFOP / Acteurs Publics
démontrent, de manière peut-être inattendue, leur
attachement aux réformes. »
Nous voilà
prévenus.
Il y a démonstration que les Français
veulent des réformes ! On dit que les Français sont
« frileux », ne veulent aucun « changement
profond » légitimité plébiscitaire ?
C'est faux et l'IFOP vous le « démontre » :
l'« idée de réforme » a même
une « légitimité plébiscitaire » ! Et si l'IFOP le dit comme ça, c'est que c'est comme ça ! L'équipe de l'institut de sondage ne loue-t-elle pas, avec toute la fermeté requise, « l'indépendance d'esprit et l'objectivité indispensables à l'analyse des opinions et des comporte- ments » qui sont les siennes ?
En effet, il y a un
consensus extraordinaire autour de cette idée et surtout
autour de celle d'une urgence à réformer ! Et
quand je dis consensus, c'est qu'il y a vraiment consensus : quel que
soit la situation socio-professionnel, quelle que soit l'inclinaison
politique, ils sont plus de 9 français sur 10 !
Formidable ! Magnifique ! Les politiques vont enfin pouvoir
travailler, en appui sur une opinion qui ne demande que ça !
Le problème,
ici, c'est qu'on n'est pas fichu de savoir quel « chan- gement »,
quelle « réforme », quelle
« évolution », quelle « modernisa- tion »
veulent ces français si consensuels ! Tout juste si on
connaît les « thématiques » :
les sondés étaient « invités à
désigner parmi quatre thématiques », à
savoir Droit du travail, Éducation Nationale, Justice et
Institutions de la Vème République. Fort
bien ! Mais de quoi parle-t-on ici ?
Les meilleurs
dictionnaires donnent pour 'réforme' la définition
suivante : « Modification effectuée dans un but
d'amélioration » (Trésor de la Langue
Française Informatisé). Soit, mais il faut d'abord
préciser que 'réforme' se distingue de 'révolution'
en ce que la modification en question s'opère dans le respect
des règles en vigueur. Ce qui donnerait, toujours selon le
TLFI, à l'entrée 'réforme' :
« correction, changement profond, transformation, par des
moyens conformes aux règles existantes, de quelque chose en
vue de le réorganiser, d'améliorer son fonctionnement,
ses résultats ». Soit, mais alors il importe de
savoir exactement la « nature du changement »,
la teneur positive de l'amélioration, etc.
Au lieu de nous
éclairer là-dessus, l'IFOP nous propose un classement
de quelques personnalités politiques bien en vue du point de vue de
leur « capacité à incarner le changement ou
la rupture » aux yeux des Français. Il s'agit de
François Bayrou, Marie-George Buffet, Laurent Fabius, Lionel
Jospin, Alain Juppé, Jack Lang, Jean-Marie Le Pen, Ségolène
Royal, Nicolas Sarkozy, Dominique Strauss-Kahn et Dominique de
Villepin. Ce sont Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal qui
« s’avèrent les deux figures qui incarnent le
plus la réforme aux yeux des Français et personnifient
ainsi le renouvellement »...
Que dire d'un tel
sondage ?
Que peut-il nous apprendre ?
Rien !
Si ce n'est que
Nicolas Sarkozy est le chouchou de l'IFOP : le détail de ce
qui se veut une analyse des résultats du son- dage est
systématiquement é- noncé en sa faveur. La baisse
de deux points entre juillet 2004 et mai 2006 est considé- rée
comme une stabilité (76 = 78 selon l'IFOP), là où
la haus- se de 10 points de Ségolène Royal est considérée
comme quasi anodine, en tant que hausse...
Tu vas dire que je
chipote, fidèle lecteur !
Sauf que je ne vois
pas l'intérêt de ce sondage en dehors de cette opération
de marketing politique ! L'UMP, après ses manœuvres
délic- tueuses (?) de e-marketing, adopte des solutions moins
frontales, plus sournoises... L'avantage de ce sondage et surtout de
l'analyse qui en est présentée à la presse est
qu'on sait maintenant pour qui roule Laurence Parisot, présidente
du l'IFOP [depuis 1990, elle dirige l'institut de sondages IFOP, dont elle détient 75% du capital] et du MEDEF... Devrai-je l'appeler Laurence collusionis regina ? Ou bien est-ce tout simplement ainsi que la présidente du MEDEF compte « réenchanter le monde » ?
Allez, un petit jeu-concours :
- quelles sont les différentes « casquettes » de Laurence Parisot ?
- en quoi mériterait-elle le surmon de Collusionis Regina ?