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BRICH59
24 septembre 2013

Veillez, car vous ne savez ni le jour ni l'heure...

Autre livre lu cet été : Intelligence économique, mode d'emploi : maîtrisez l'information stratégique de votre entreprise / Arnaud Pelletier, Patrick Cuénot. - Montreuil : Pearson France, 2013. - XII-276 p. - (Management en action). - ISBN 978-2-7440-7581-0 : 29 € (existe en version PDF et ePub). Super bouquin dont l’intérêt pratique est indéniable : les pistes méthodologiques et les outils abondent, sur un fond théorique assuré. L'ADBS publiera bientôt ma petite note de lecture dans sa revue scientifique (ici en ligne sur le site de l'association)...

Juste une petite remarque quasi anodine mais qui veut être digne de la rigueur théorique et pédagogique dont les auteurs font montre tout au long de leur ouvrage. Il s'agit de l'apparition de ce bon vieux "Jésus-Christ" toujours jeune au début du chapitre sur la veille, le premier. Je dois avouer que, mécréant depuis toujours mais possédant une solide culture chrétienne (un vrai mécréant qui sait de quoi il cause, quoi !), le veilleur que je suis a été interpelé voire interloqué par cette citation de l'Évangile de Matthieu (25, 13) : "Veillez, car vous ne savez ni le jour ni l'heure".

Il y a quelques années, j'ai rêvé d'une herméneutique documentaire où la technique documentaliste permettait de produire et de faire circuler du sens et de la signification. Cette technique utilisait abondamment l'intertextualité - dont il se trouve que la citation est l'une des figures.
La richesse de l'intertextuel réside, si j'ai bien compris, dans la communication signifiante. Quand je cite un texte, je ne fais pas qu'un simple copier-coller, j'importe dans le texte nouveau quelque chose de l'ancien texte et pas seulement ce que je reproduis littéralement, j'embarque avec les mots ce qui les environne nativement et leur donne une signification particulière, unique. Autrement dit, importée, une phrase porte encore en elle quelque chose de sa naissance, de son lieu originel.

Concrètement, dans cette page 3 de l'ouvrage d'Arnaud Pelletier et Patrick Cuénot, quel est l'intérêt de la citation du verset 13 du chapitre 25 de Matthieu ? Je ne cherche pas à savoir quelle a été l'intention des auteurs. Non ! Objectivement, si l'Évangile est là, c'est qu'il y a une raison de signification. La présence du verbe "veiller" ne saurait suffire à justifier cette incrustation du texte biblique dans un ouvrage technique.

Regardons donc les versets 1-13 du chapitre 25 de l'Évangile de Matthieu [trad. http://www.aelf.org/] :

  1. Alors, le Royaume des cieux sera comparable à dix jeunes filles invitées à des noces, qui prirent leur lampe et s'en allèrent à la rencontre de l'époux.
  2. Cinq d'entre elles étaient insensées, et cinq étaient prévoyantes :
  3. les insensées avaient pris leur lampe sans emporter d'huile,
  4. tandis que les prévoyantes avaient pris, avec leur lampe, de l'huile en réserve.
  5. Comme l'époux tardait, elles s'assoupirent toutes et s'endormirent.
  6. Au milieu de la nuit, un cri se fit entendre : 'Voici l'époux ! Sortez à sa rencontre.'
  7. Alors toutes ces jeunes filles se réveillèrent et préparèrent leur lampe.
  8. Les insensées demandèrent aux prévoyantes : 'Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s'éteignent.'
  9. Les prévoyantes leur répondirent : 'Jamais cela ne suffira pour nous et pour vous ; allez plutôt vous en procurer chez les marchands.'
  10. Pendant qu'elles allaient en acheter, l'époux arriva. Celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle des noces et l'on ferma la porte.
  11. Plus tard, les autres jeunes filles arrivent à leur tour et disent : 'Seigneur, Seigneur, ouvre-nous !'
  12. Il leur répondit : 'Amen, je vous le dis : je ne vous connais pas.'
  13. Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l'heure.

la croix, plus ancienne antenne de communication ?Loin de moi l'idée de me livrer à une exégèse dont je suis bien incapable. Juste voir ce que signifie ce "Veillez donc" du verset 13 - qui fonctionne comme la "morale" de la petite parabole des dix vierges. Je traduis grossièrement cette morale : nous ne savons ni le jour ni l'heure de notre mort (comparution devant Dieu, ici arrivée de l'"époux") ; il convient donc de se tenir prêt ("veiller") - ce que la foi (l'huile) facilite.
Autrement dit, dans cette histoire, on sait ce qu'on attend. On ignore juste quand. La mort vient comme une voleuse, c'est bien connu et l'image du voleur est aussi dans le texte biblique dans ce contexte sémantique-là.
D'où mon malaise quand je lis sous la plume des auteurs de notre ouvrage sur l'IE que ledit Jésus "savait déjà que surveiller son environnement permettait de se préparer à l'imprévu, donc de l'anticiper". Nous sommes à l'envers de ce que signifie le texte cité. Jésus dit qu'il faut être prêt à mourir et que la foi prépare à la comparution devant Dieu. La mort est prévue et il n'y a rien à craindre si on a toujours eu une conduite guidée par la foi... On est vraiment loin de l'IE, non ? On est plutôt dans une problématique digne du pari de Pascal.
Du coup, la bonne question suivante est : qu'apporte cette citation de Matthieu ? qu'est-ce qu'Arnaud Pelletier et Patrick Cuénot veulent passer comme signification quand ils citent de la sorte ?
Ces derniers peuvent répondre ici même à cette chipoteuse question.
Reste que, quelle que soit leur réponse - si elle vient jamais -, elle ne diminuera en rien l'immense intérêt de leur ouvrage !

En clin d'œil, photo prise en Bretagne cet été, où l'on assiste à la concurrence-complémentarité de trois types d'antenne de communication, chacun captant des messages de provenance particulière : satellitaire, herzienne et ... ecclésiastique, voire divine ;-)


 

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