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BRICH59
6 juillet 2005

Mathématiques et illettrisme

Mathématiques & illettrisme 
Une action de formation de formateurs sur la durée

t_typogenerator_1119590770Communication de Jean-Pierre Leclère lors de la Rencontre Internationale Francophone du 5 au 7 avril 2005 à Lyon, organisée par l'Agence Nationale de Lutte Contre l'Illettrisme, dans le cadre de la mise en place du Forum permanent des pratiques des intervenants de la lutte contre l’illettrisme. Rubrique : Démarches et outils d’apprentissage en formation de base : quels choix pour quels usages ? Cette communication a déjà fait l'objet d'une présentation dans ces colonnes.

Groupe régional Nord Pas de Calais

 

Résumé :

Le « chantier Maths & illettrisme » est né de l'inscription dans un projet EQUAL (Région mobilisée contre l'illettrisme, Nord-Pas-de-calais) de l'opérationnalisation possible de travaux de recherche universitaire qui tendaient à montrer qu'une formation en mathématiques dans le cadre des ateliers de lutte contre l'illettrisme permet de développer tous les modes de communication qu'ils soient oraux, écrits ou physiques... Des formateurs de formation de base de la région Nord-Pas-de-Calais et de Belgique francophone se sont réunis pour définir des progressions modularisées à partir d’une bonne connaissance de ce que sont les mathématiques et en redessinant la relation maths/illettrisme, puis élaborer des supports pédagogiques en respectant quelques principes d’écriture.

 Parmi ces derniers, on notera la détermination de la spécificité des outils pédagogiques par la nature des publics, l'appui sur la réalité épistémologique des mathématiques ainsi que sur la « théorie des registres », enfin la prise en compte ce que savent et comment savent les personnes en formation.

Au fil de l'expérimentation, il apparaît que la pratique développée a un réel impact sur le rapport à soi des apprenants (réassurance, avec effet biographique et effet psycho­sociologique), leur rapport à la communication écrite et orale et, bien sûr, leur rapport aux mathématiques. Les formateurs engagés sur ce chantier de trois années ont eux aussi bénéficiés des effets de leur propre travail collectif.

 

PLAN DU DOCUMENT

1 EQUAL et Sciences de l’éducation

2 Les parties en présence

3 Quiproquo et parti pris

4 Les grandes périodes de la vie du groupe

5 Des principes d'écriture pédagogique

6 Effets et impacts


EQUAL et Sciences de l’éducation

« La lutte contre l'illettrisme intègre souvent la capacité à savoir compter dans ses objectifs de formation. Mais, dans ce cadre, les mathématiques occupent une place assez ténue quand elle n'est pas absente, remplacées qu'elles sont par du numérique algorithmique. Le travail de recherche qu'a conduit Jean-Pierre Leclère[i] visait à montrer qu'une formation en mathématiques dans le cadre des ateliers de lutte contre l'illettrisme pouvait aider efficacement à sortir d'une telle situation. En particulier, les mathématiques (et non pas uniquement le "compter") permettent de développer tous les modes de communication qu'ils soient oraux, écrits ou physiques. 
« Une formation en action de formateurs intervenant dans le domaine des mathématiques, en région Nord-Pas-de-Calais et en Belgique, apparaissait, pour ces raisons, tout à fait justifiée dans le cadre d'une réflexion générale sur la lutte contre l'illettrisme... »

C’est en ces termes que le « chantier Maths & illettrisme » s’est ouvert. C’est ainsi du moins que le responsable du projet EQUAL Région mobilisée contre l’illettrisme – RÉMO[ii] en présente le volet qui nous concerne… Ce chantier devait permettre, à partir de l'important travail de Jean-Pierre Leclère, de définir des progressions modularisées et des supports de cours. Sa participation, par ailleurs, à l’élaboration d’un référentiel comparable au référentiel linguistique de base qui fait aujourd’hui cruellement défaut aux formateurs n’est pas étranger à notre chantier. L’innovation en vue est de portée nationale, voire internationale puisque certains de nos collègues belges francophones nous ont rejoints.

La recherche engagée par Jean-Pierre Leclère veut associer mathématiques et illettrisme : il semble clair que, lorsque l'on associe mathématiques et apprentissage de la lecture et de l'écriture dans un atelier de lutte contre l'illettrisme, les adultes en formation progressent plus rapidement. La recherche a voulu confirmer cette conviction générale, et celle, en particulier, qu'il est possible de faire faire des mathématiques à un public en difficulté de lecture et d'écriture, le tout en appui sur trois axes : l'enseignement et l'acquisition de savoirs, l'accueil, et la création d'outils pédagogiques.

L’action que nous présentons est ainsi directement dans la perspective de ce travail de recherche en Sciences de l’éducation, avec ses deux grands objectifs :

  • définir des progressions modularisées, mais à partir d’une bonne connaissance de ce que sont les mathématiques ;

  • élaborer des supports pédagogiques, mais en respectant quelques principes d’écriture.

Les parties en présence

Depuis 1996, afin de résoudre une série de difficultés anciennes (offre de formation ponctuelle, non articulée ; ciblage des publics incertains ; peu d'outils de repérage ; opacité des contenus de formation ; etc.), la région Nord-Pas-de-Calais, qui compte une importante population en situation d’illettrisme, s’est configurée en une quinzaine de « dispositifs permanents pour la maîtrise des savoirs de base » - DPMSB. C’est sur cette carte régionale que se repèrent les parties en présence dans notre action.

Les organismes de formation impliqués dans le chantier œuvrent dans divers lieux du Nord-Pas-de-Calais et de la Belgique francophone. Ils relèvent pour la plupart du secteur associatif.

Le groupe des participants est hétéroclite, du point de vue des fonctions : responsables de centres, coordinateurs, formateurs. À noter que certains n’ont jamais enseigné les mathématiques…

Les adultes en situation d'illettrisme en mathématiques sont des adultes qui éprouvent d’importantes difficultés à donner du sens à des nombres exprimant des quantités et des mesures, des évolutions et des durées, des identifications et des numéros. Ils ne parviennent pas non plus à réaliser des sériations et des classifications ; il leur est très difficile d'opérer des inclusions et des combinatoires. Pour ces raisons, il ne leur est pas aisé de distinguer entre un caractère continu et un caractère discret, et les difficultés à intégrer les concepts de longueur, de masse, d'aire et de volume en sont la conséquence. De même il leur a été très difficile, voire impossible d'acquérir la numération décimale… Au cours de sa recherche, Jean-Pierre Leclère a pu repérer certains indices spécifiques à l'illettrisme en mathématiques. Ce sont par exemple :

  •  l'incapacité de se repérer durablement dans le temps ou l'espace (les lectures de plan, de tableau, de représentations iconiques),
  •  une énorme difficulté à indiquer un effectif au-delà de 60 par comptage ou calcul,
  •  la non maîtrise des opérations soustraction et multiplication,
  •  la difficulté de situer deux nombres par rapport à un troisième,
  •  la confusion entre situation présente et situation passée ou à venir,
  • l'incapacité à traiter un problème à texte rédigé (caractéristique commune au repérage linguistique).

Ces indices apparaissent comme pertinents pour identifier un public en situation d’« illettrisme en mathématiques », mais il est prudent de ne pas en faire des critères de repérage inébranlables…[iii]

Quiproquo et parti pris

Le « chantier Maths & illettrisme » s’est ouvert sur un malentendu : les formateurs et leurs organismes pensaient qu'ils allaient avoir des outils et un référentiel...

Non seulement ils n'ont pas eu de référentiel, mais ils se sont rendus compte que les outils qu’ils utilisaient n'étaient pas vraiment des outils, pas des outils au "sens fort", du moins pas utilisés comme il convenait...

Le quiproquo a tourné à la désillusion et la désillusion à l’engagement sur un parti pris solide qui se décline en trois mouvements :

  •  une nouvelle conception des maths et de la relation maths/illet­trisme ;
  •  un esprit collaboratif fort, d’où primauté accordée à l’échange entre les participants, esprit collaboratif d’autant plus efficace et producteur de richesse que le groupe est hétérogène à de nombreux points de vue ;
  •  un objectif de production collective, où la production (écriture) d'outils pédagogiques est le « ciment » de la vie du groupe.

Les grandes périodes de la vie du groupe

Démarrée en 2002, l’action en est aujourd’hui à sa troisième année…

La première année fut une année de « formation de base Maths & illettrisme » : en appui sur des apports théoriques, les participants ont pu découvrir des activités susceptibles d’être mises en place avec un public adulte en situation d’illettrisme, utiliser différentes méthodes pour trouver un résultat, tester des supports existants et les améliorer si nécessaire, créer de nouveaux supports pédagogiques, confronter leurs outils de repérage et élaborer des tests de positionnement de niveau 1 et 2, échanger leurs pratiques et leurs expériences...

La plus grande partie des apports théoriques est issue du travail de recherche en Sciences de l’Éducation, mené par Jean-Pierre Leclère, et a tendu vers un travail définitionnel autour de la notion de savoirs de base en mathématiques.

La deuxième année vit le début de la production collaborative d’un outil pour adultes. On commença par déterminer collectivement les grands domaines mathématiques que doit couvrir l’outil nouveau : on en trouva six, à savoir numération, opérations, problèmes, géométrie, mesures et logique. Vu l’effectif du groupe de formateurs, on décida de constituer trois groupes de production qui traiteront de trois domaines. Chaque groupe commença alors par lister compétences clés, objectifs et niveaux de difficulté (linguistique notamment). Après quoi s’enclencha un travail en autonomie, sous le contrôle et avec les conseils de J.-P. Leclère… Il faut reconnaître un certain tâtonnement collectif, les groupes cherchaient leur méthode de production…

La troisième année, la production se poursuivit, d’un pas plus assuré. Le groupe de travail a opté pour l’appellation de l’outil : Mathématiques à la carte pour adultes, MACPAD. Chaque fiche est codée ainsi : compétence travaillée - niveau de lecture/écriture – n° de la fiche. Certaines fiches furent sélectionnées et utilisées en situation : toutes les difficultés rencontrées par les apprenants lors de l’expérimentation firent l’objet d’un retour auprès du groupe, pour analyse collective.

Des principes d'écriture pédagogique

Cinq grands principes d’écriture pédagogique furent adoptés par le groupe et leurs implications guidèrent le travail de création.

Détermination de la spécificité des outils pédagogiques par la nature des publics

Parce que les adultes ne sont pas des enfants, parce qu’ils sont au contraire très « marqués » par leur culture, et par leur expérience de vie, il n’est pas possible que des outils pédagogiques créés, pensés pour des enfants leur soient adaptés. Le principe 4 ira plus loin dans cette idée, la déclinant du strict point de vue des mathématiques…

Appui sur la réalité épistémologique des mathématiques

C’est la prise en compte de la réalité épistémologique des mathématiques qui a guidé l’identification des objectifs d’apprentissage : dénombrement des champs mathématiques dans les savoirs de base pour déclinaison en sous-champs puis en niveaux de compétence… (cf. deuxième année).

Appui sur la « théorie des registres » (Raymond Duval)

Raymond Duval s’intéresse au concept de registre de représentations sémiotiques en particulier dans le cadre des activités mathématiques : face à un énoncé de problème, par exemple, on peut opérer deux transformations, le traitement, transformation de la représentation dans le même registre - par exemple, la reformulation simple (même langage) de l’énoncé de problème -, et la conversion, transformation de la représentation dans un registre différent - par exemple, la traduction algébrique d'un énoncé. L'idée est que la compréhension n'émerge qu'avec la coordination d'au moins deux registres de représentation et que, par conséquent, l’apprentissage est directement facilité par la conversion, notamment quand il n’y pas congruence ...

Prise en compte ce que savent et comment savent les personnes en formation

Les personnes en situation d’illettrisme ne sont pas « mathématiquement vierges » quand elles arrivent en formation.

Par contre elles ont pu développer une vision réduite des mathématiques (du fait de leur expérience scolaire, par exemple). D’où la nécessité de désinhiber les apprenants (compter sur les doigts par exemple, c'est aussi faire des maths) ; d’où la nécessité de passer des maths formelles, scolaires à des maths à portée de mains[iv].

Plus positivement, il y a bien nécessité de prendre en compte leurs conditions de vie matérielle - jusque dans ses répercussions d’ordre symbolique -, de prendre en compte les dimensions sociales et culturelles de leur expérience de vie. Ce qui nous mène vers une « éthno-mathématique ».

Double validation

La validation s'est déroulée en deux temps : d'abord entre pairs dans le grand groupe, après le travail en groupe de production, puis dans le cadre de l'expérimentation par les formateurs du groupe et leurs collègues sur le terrain. Après cette double validation seulement, pourra s’effectuer le transfert à d'autres organismes.

Effets et impacts

Cette action et les pratiques qui s’y développent semblent avoir eu un impact fort sur les personnes en formation et les formateurs en formation et en expérimentation.

Les personnes en formation

Rapport à soi (réassurance), rapport à la communication écrite et orale et, bien sûr, rapport aux mathématiques : tels sont les trois registres sur lesquels la pratique développée semble avoir un impact réel.

Rapport à soi (réassurance)

Au cours d’une action de formation engageant une telle pratique, le rapport à soi des apprenants peut se trouver modifier de deux façons. Nous distinguerons un effet biographique et un effet psychosociologique (au sens de la psychosociologie de la formation).

Effet « biographique » : 
cette nouvelle façon d’appréhender les mathématiques va produire chez l’apprenant le désir de revisiter sa propre vie, notamment octroyer un nouveau sens à ce qui touche au rapport au savoir (école, travail…), revalorisant certains savoir-faire autrefois dénigrés, certaines compétences jusque là occultées.

Effet psychosociologique global (représentation de la formation) : 
du coup, c’est tout le rapport à la formation qui s’en trouve changé. La formation n’est plus perçue comme un inaccessible, comme un interdit, mais comme un possible, comme une réussite possible.

Rapport à la communication écrite et orale

En situation de formation, l’apprenant sera appeler à développer sa compétence communicationnelle de deux façons : dans le cadre de l’apprentissage lui-même (parler les mathématiques) et dans celui de la relation pédagogique (parler des mathématiques).

Parler les mathématiques, cela signifie convertir au sens de R.Duval (cf. les registres sémiotiques), par exemple lorsqu’un apprenant énonce une opération, il passe d’un langage formel au langage dit naturel…

Parler des mathématiques, cela signifie communiquer, par exemple dans le groupe d’apprenants ou tout simplement avec le formateur, au sujet du travail mathématique que l’on vient d’effectuer.

Rapport aux mathématiques

Cette capacité à parler des mathématiques associée à une réassurance en soi vont modifier significativement le rapport aux mathématiques. Un tel changement pourra s’extérioriser de deux façons : par la demande de formation et dans la relation pédagogique.

Demande de formation : 
cette capacité, nouvellement consolidée voire acquise, à parler des mathématiques va rendre possible l’expression d’une demande de formation relativement explicite et peut-être en termes de désir.

Conflit pédagogique : 
du coup, l’apprenant n’acceptera peut-être plus de travailler avec des outils pédagogiques de la formation initiale pour enfants, même « adaptés », ni de faire des mathématiques déconnectées de son propre horizon socioculturel, etc.

Les formateurs

Côté formateurs également, les effets et impacts sont importants. Nous en avons distingués cinq.

effet « humilité » du formateur

L’une des caractéristiques du « chantier Maths & illettrisme », c’est bien son double niveau : niveau formateur et niveau apprenant. Et les formateurs n’ont pas manqué de développer le parallèle jusque dans les confins de la psychologie personnelle : ils ont été avec leur formateur, Jean-Pierre Leclère, en situation de stagiaire. D’où la conscience d’une certaine « humilité ».

effet didactique

« moi, formateur, je maîtrise mieux la « matière » et, du coup, je suis plus à l'aise pour inventer des situations pédagogiques (jeux, etc.)… Maintenant je m'autorise à créer… »

effet méthodologie

Le travail accompli en pédagogie des mathématiques dans le cadre du chantier (cf. les principes énoncés plus haut) est, aux yeux des formateurs, transférable à d'autres disciplines, de toutes façons à la formation de base en général.

effet relation pédagogique

La pédagogie développée dans le chantier est très concrètement une pédagogie de la « réussite » - ce qui ne peut qu’avoir un impact fort sur la relation pédagogique elle-même.

effet prosélytisme

Après la « révélation » de la vraie place des maths dans la lutte contre l'illettrisme – du moins est-ce ainsi que parlent certains participants -, risque de contamination positive de l'entourage professionnel…


Ont participé à ce travail pour la région Nord Pas de Calais :

  • Michel BAIL, ID-Formation, Lille
  • Frédéric BARY, CZ AFP2I, Arras
  • Serge CAILLEUX, CREFO, Saint-Omer
  • Francine DECOBERT, NORD DEFIS, Dunkerque
  • Joëlle DEHAYNIN, CREAFI, Lille
  • Ahmed ERCHOUK, Culture & Liberté, Lewarde
  • Serge ÉVRARD, CUEEP, Lille
  • Jean-Pierre LECLERE, CUEEP, Lille
  • Chantal LEFEBVRE, ALEC, Cauroir
  • Simone MALVILLE, FORMINTER, Sin-le-Noble
  • Amar MOKHTARI, UFCV, Roubaix
  • Régine OLIVA, Lire & Écrire, Charleroi Belgique
  • Smaïne OULD BOUAMAMA, INSTEP, Lille

Expert : Bruno RICHARDOT, responsable ingénierie documentaire au CUEEP-Lille (rédacteur de ce texte final)
Référente : Latifa LABBAS, chargée de mission régionale illettrisme


 

[i] J.P.Leclère, professeur certifié à l'Université Lille1, est tout à la fois conseiller en formation au département Mathématiques du CUEEP et docteur en Sciences de l'Éducation (laboratoire Trigone). Formateur de formateurs dans le domaine « mathématiques et illettrisme » et concepteur de la filière modulaire mathématique de niveau VI du CUEEP, il est coauteur de Lettris. Sa thèse s’intitule : Faire faire des mathématiques à un public en situation d'illettrisme, le contraire d'une utopie.

[ii] Cf. https://equal.cec.eu.int/equal/jsp/dpComplete.jsp?cip=FR&national=NPC-2001-10159.

[iii] Ces notes concernant le public reprennent plus ou moins fidèlement un passage de la thèse de Jean-Pierre Leclère.

[iv] Importance de la manipulation : utiliser tout ce qui constitue le micro-espace de l’apprenant (ce qu'il a à portée de main), voire le méso-espace (ce qu'il a à portée de regard).



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5 juillet 2005

Laurence Parisot, présidente des patrons

h_4_ill_669469_gamma_789155_331Comme prévu, Laurence Parisot a été élue aujour- d'hui présidente de l'orga- nisation patronale.

Elle est la première femme portée ainsi à la tête des patrons français... "Vous m’avez choisie, a-t-elle aussitôt déclaré, pour présider notre Mouvement qui en choisissant de porter une femme à sa tête indique à la France entière l’esprit de modernité qui anime ses entreprises."
Une victoire pour notre trop bonne et trop belle démocratie française ?
Neteconomie.com clame que c'est historique.  Je propose que nos sœurs de Ni putes ni soumises fêtent ça avec la dignité requise ! La Tribune y voit de une "innovation" importante. La CGT, elle, salue déjà l'événement, tout en se demandant, la perfide, "si cela contribuera à une dynamique d'égalité professionnelle dans les entreprises. Rien n'est moins sûr", conclue-t-elle. Aucun sens du dialogue cette CGT ! Elle fait du procès d'intention, non ? La ministre déléguée à la Parité, Catherine Vautrin, dément formellement, y voyant "un symbole fort pour l'évolution de l'égalité professionnelle" en France. La CFTC, quant à elle, veut y croire... En tout cas une femme admirable, si l'on en croit FR3.Franche Comté : "Née le 31 août 1959 à Luxeuil-les-Bains en Haute-Saône, Laurence Parisot, fille et petite-fille d'entrepreneurs, dit être "tombée toute petite dans le chaudron de l'entreprise, comme Obélix dans la potion magique". Après des études de droit et de sciences politiques, elle devient directrice générale de Louis Harris à 26 ans, puis à 30 ans PDG de l'Ifop, un des plus anciens instituts de sondage. En 2002, à la mort de son père, elle reprend la présidence de la la société familiale Optimum, leader français de la porte de placard, implanté dans le Lot-et-Garonne. Elle siège en outre dans plusieurs conseils d'administration de grandes entreprises, telles Michelin, Eurodisney et Havas. Célibataire, sans enfant, elle est chevalier de l'Ordre national du Mérite." Bref, une femme comme les autres mais qui a su mériter d'arriver là où elle est arrivée !

Laurence est venue se faire élire avec un Cahier des charges pour une France qui gagne. Côté face du programme. Elle dit qu'il faut "reformater" l'État, cette chose omniprésente et trop crispée à son goût. Côté pile du programme. Ses trois valeurs fortes seraient "le travail, l'esprit d'entreprise et le pragmatisme". Ça a l'air mieux que Travail-Famille-Patrie de triste époque. Mais ATTENTION ça pourrait très bien vouloir dire
  • travail de ces feignants de salariés
    (ne parlons pas des feignantissimes fonctionnaires ni des chômeurs, tous volontaires bien sûr, ou alors ils l'ont sûrement bien cherché !),
  • esprit d'entreprise de ceux qui ont mérités (de par leur naissance) d'être riches, et donc sont les seuls habilités à avoir de l'esprit, à réfléchir,
  • avec le pragmatisme comme religion d'État, c'est-à-dire comme absence de principes moraux et politiques (il me semble que le mot grec pragma, très polysémique, veut dire entre autres affaire(s), quelque chose comme business).
En fait, c'est la liberté qui l'intéresse, au fond, Laurence. Une grande démocrate, quoi ! L'un des ses principaux objectifs est de "libérer [les] entreprises de toutes les contraintes qui pèsent sur elles". Quand la CGT dit que Laurence "veut gagner la liberté des entreprises contre celle des salariés, contre leur droit à travailler dans la dignité", elle fait encore du procès d'intention ? Quoi qu'il en soit, comme dit Le Monde, "sa philosophie est connue : "Il est insupportable de constater que la liberté de penser s'arrête là où commence le droit du travail", déclarait-elle en janvier à l'assemblée générale du Medef. Depuis, elle a toutefois nuancé son propos et se dit prête à "prouver que libéral ne veut pas dire antisocial"".
Il s'agit juste de moderniser la France. Celle qui gagne, celle des patrons, se modernise à vue d'œil - serait-ce en élisant une femme à sa tête. L'autre France - celle qui perd ? - n'a qu'à suivre ! Trève de mauvais esprit ! On attend. Sans rire.

[photo DE MALGLAIVE ETIENNE / GAMMA
repiquée de la page web du Monde
daté du 6 juillet 2005
]


5 juillet 2005

L'ActIonaute de juillet

l'ActIonaute ©Amnesty International                      Juillet 2005
            
mensuel d'information et d'action du site Internet d'Amnesty-France 


est paru. Si vous n'y êtes pas abonné, vous pouvez le lire à

http://www.amnesty.asso.fr/08_ai_info/actionaute_juillet2005.htm



1 juillet 2005

Histoire de globe-formateur

sncf_tgv27 Juin.
Lille Europe 12h17 -> 15h05 Lyon-Part Dieu 15h27 -> 15h45 Vienne (en France !). Ce devait du moins être comme ça. Mon GO préféré m'avait proposé cet horaire, que j'avais accepté. Je pourrais ainsi flâner à Vienne, ville inconnue pour moi. À peine avais-je entendu parler de son festival de jazz, fin juin-début juillet, dont l'affiche 2003 avait fait scandale à l'évêché : le visuel parodiait en diablotin un enfant Jésus tétant la Vierge sa mère ("Vierge noire") ! Cette affaire avait fait provoqué des nauséabonds relents de censure inquisitoriale jusque dans les rangs des élus du Conseil régional, jusque dans les allées de l'exécutif de la Région... En fait le TGV est arrivé chez le Primat des Gaules avec une bonne demie heure de retard. Le TER qui devait me conduire jusqu'à Vienne a donc commencé son office avant que je ne puisse monter à son bord.


jazzaviennebArrivé en gare de Lyon-Part Dieu, je cherche l'horaire du prochain train pour Vienne. Il démarre à 15h47 mais de Lyon-Perrache. Il fait 36°. À peu près. Ma valise et mon sac sont lourds. Je ne suis qu'un quinqua peu clinquant. Je ne connais pas trop bien le trajet d'une gare à l'autre. Je décide d'attendre le prochain départ pour Vienne de Lyon-Part Dieu.

Sortant de la gare, je vois plusieurs terrasses couvertes, prêtes à m'accueillir. J'en choisis une, celle qui a l'air la plus fraîche (?). J'ai le temps. Le train démarre dans presque deux heures. Le temps de déguster goutte à goutte une bière bien fraîche, une Kro quasi glacée. D'ordinaire, j'ai horreur de la bibine glacée, mais là ! Mieux qu'un régal ! Une salubrité privée ! Lyon, capitale des Gaules vend Le Monde dès le début d'après-midi. J'ai ainsi plus d'une heure pour lire Le Monde, version papier journal. Voilà un siècle que ça ne m'est pas arrivé !

lemondefr_grdOn est lundi. Le quotidien que j'ai entre les mains est donc daté de mardi. Dans le supplément hebdomadaire économique, une page entière est consacrée au projet de loi transposant le droit communautaire à la fonction publique, projet de loi adopté en première lecture en mars-avril, et devant passer en seconde lecture au Sénat en juillet. Souviens-toi, camarade contractuel, de ce projet de loi excluant du bénéfice d'un CDI dans la fonction publique - finalement excluant tout court - des personnels aujourd'hui en CDD exerçant des missions d'insertion et de formation, alors même que leur activité permet de satisfaire un besoin pérenne, reconnu par la loi s'agissant de l'apprentissage et de la formation continue... Bref, je lis tranquillement cette page, dans l'espoir de trouver une information rassurante sur le sort que l'on te réserve en haut lieu. Rien. Je ne trouve rien pour étancher ma soif d'info ! Le débat est ailleurs, centré sur le statut de ceux qui ont déjà un statut - et qui font bien de se battre pour qu'il ne soit pas mis à mal !
...
train_compartement17h32. Le TER entre en gare. C'est un train avec des compartiments huit places. Comme quand j'étais petit et que je faisais Paris-Besançon pour les vacances. Il est à peine en retard. L'air est rare dans le compartiment. La clim' envoie une méchante odeur... Une demie heure et je suis à Vienne. Je tire ma lourde valise hors du train. Puis hors de la gare. Puis hors de Vienne. Je franchis le Rhône sur une passerelle réservée aux piétons à valises à roulettes, aux cyclistes et aux autres piétons. Un grand panneau indique "Rhône en fête". En fait, je ne vois rien qui ressemble à ce qu'indique le panneau, pourtant grand. Plus de trace visible du Rhône en fête. C'était il y a une dizaine de jours... De la passerelle, la vue est sympa : on est comme suspendu au dessus du creux central d'un pays aux bords relevés et parsemés de vestiges médiévaux et Renaissance. Romantique ! J'imagine Chateaubriand décrivant le tableau circulaire...


srgPassé la passerelle, je traverse Sainte Colombe puis arrive à Saint Romain en Gal, où se trouve l'hôtel que mon GO m'a choisi et le lieu de la formation que je dois animer du 28 au 30. L'hôtel s'appelle Le Terminus et habite avenue de la Gare. Celle-ci est une vieille bâtisse désaffectée aux pierres jaunies. Quand j'entre dans le bar-hôtel, une femme âgée m'accueille de derrière le comptoir. Je me présente, disant que je viens de Lille. Elle me répond, invoquant le nom de mon GO. Je dis que c'est ça, le nom de mon GO. Nous discutons un peu. Elle est la mère du patron. Elle retravaille depuis aujourd'hui seulement, après une période de maladie et de douleur. Je la questionne sur les conditions d'hébergement et de repas. Elle ne sait pas trop. Je verrai avec son fils. Elle me conduit à ma chambre, montant les escaliers avec peine et souffrance. Elle s'excuse de n'avoir pas allumer les ampoules du couloir. Je lui dis que ce n'est pas grave, qu'on y voit assez et que c'est plutôt agréable par contraste avec la lumière aveuglante du dehors. Elle ajoute, maugréant, que ça permet de ne pas voir la poussière. Elle ouvre la porte de ma chambre, et y jette un regard circulaire, feignant de ne pas voir l'étonnante oblique de la tringle à rideaux. La chambre est assez grande. Deux lits deux places pour moi tout seul ! Les plaques du faux plafond menacent. Quelques toiles d'araignée ont capturé des moutons de poussière, des petits moutons suspendus. Les toilettes sont sur le palier. Il n'y a que six chambres en tout. Posée à droite de la télévision, une bombe "Kapo insectes rampants + 25% gratuit". Je regarde dans les coins et au bas des murs. Beaucoup de poussière. Avant de m'attaquer, les cafards auront à faire le ménage ! Il n'y a pas de gel douche sur le lavabo. J'en parle à la dame qui semble étonnée que je fasse ce constat-là. Je lui dis que je vais aller en acheter. Elle me parle du Casino pas loin...
...
van_der_aa_1725_vienne_palace1Je sors me balader. Je descends vers le Rhône et prends la passerelle. J'erre au hasard des rues de Vienne. C'est tout petit Vienne. C'est tout joli. Tous les volets sont clos. Mais les fenêtres doivent être ouvertes derrière les volets de bois. On entend les bruits familiaux dans les petites rues.


20h. La dame m'avait dit que c'était l'heure du dîner. Je suis ponctuel. Dans la salle à manger, les plaques du faux plafond menacent aussi. Des affiches "Jazz à Vienne" s'étalent en collection sur les murs (série complète 1988-2004). Je revois, non sans un "malin" plaisir, celle de 2003. Le repas se laisse manger. C'est le fils de la dame qui cuisine. Il est sympa. On discute un peu. Il m'explique les conditions d'hébergement et de restauration. La demie pension, ça vaut le coup; ça vous met le repas du soir à cinq ou six euros ! Je vais enfin pouvoir participer au redressement financier de mon institution ! Un tout petit peu. Je veux dire qu'on discute un tout petit peu, le fils de la dame et moi. Car il a à faire : six personnes ! Tout l'hôtel est là, à table(s). Tous les convives, chacun à sa table, sont installés de façon à voir l'écran de télévision extra plat, seul objet de quelque nouveauté dans l'arrière-bar. Dans le poste Monsieur Sarkozy dit que "les faits parlent d'eux-mêmes ". Il n'a toujours pas compris, le pauvre, que les faits ne parlent pas ! Il les fait parler et il dit qu'ils parlent, les faits ! Il est fou ! Fou ? Il sait sûrement trop bien ce qu'il dit, hélas ! Ça manque d'air, tout ça ! Toutes les portes du resto-bar sont ouvertes en quête d'un improbable courant d'air.
...
boug1Il y a quinze jours, quand je suis allé à Beaune pour animer la même formation, mais pour des agents de missions locales de la région Bourgogne, je n'ai pas manqué d'air ! Je me suis laissé aller à dîner façon dégustation de ... Bourgogne. Comme à midi je mangeais pour cinq euros, ça faisait une moyenne honnête, eu égard au "forfait" remboursable... Mais on m'a fait remarquer que mes notes du soir dépassaient les 15,25 euros ! Alors à Saint Romain en Gal, près de Vienne, je fais au plus juste. Tout le monde sans exception aucune dans notre belle institution se serre la ceinture. Il n'y a pas de raison que je n'en fasse pas de même.

J'ai manqué d'air toute la nuit. Température excessive. De plus, il n'est pas question que je dorme fenêtre ouverte. Tout à coup s'incruste sur mon petit écran intérieur une image vue à plusieurs reprises dans les livres scolaires de ma jeunesse, celle où l'on peut voir tous les modes de transports : le long d'un fleuve, une route conduit vers un aéroport d'où décolle un avion, la route longeant un temps une voie ferrée sur laquelle glisse un train plein d'enfants partant en vacances... Je me sentais, quant à moi, cette nuit-là, au beau milieu d'un tel ensemble, parce que j'ai fini par ouvrir la fenêtre pour échapper à une mort lente par suffocation-transpiration : route juste en dessous de ma fenêtre avec voitures sonorisées et mobylettes pétaradantes dessus, autoroute tout en haut avec trafic intense, voies ferrées entre les deux avec trains dessus qui roulent lentement mais lourdement. Tout en bas du tableau coule le Rhône, sans un bruit, mais trop loin pour que je goûte le plaisir de son calme souverain et puissant...

lyceeLe lendemain matin, je rencontre mes stagiaires trihémérides. Enfin ! Je sais que ça ne va pas être de la tarte, ces trois jours d'initiation aux tech- niques documentaires... C'est encore une fois un groupe hétérogène sous plein d'aspects : compé- tence en techniques documentaires, pratiques de la fonction documentaire, ancienneté dans le réseau Missions Locales, rôle et fonction dans la Mission Locale, niveau de formation générale, motivation à suivre cette formation de trois jours, etc. Tout ceci devant être considéré comme un système de données préalablement connues (j'adresse systématiquement un questionnaire préalable aux stagiaires et obtient un taux de réponse important), j'ai le sentiment de détenir une bonne part des rennes de la situation, de pouvoir influer sur le cours et la nature des événements pédagogiques qui vont advenir, de disposer des moyens de, tout à la fois, répondre au besoin collectif de bases méthodologiques en techniques documentaires et prendre en compte l'individualité de leurs motivations et de leurs attentes. Ça me contraint parfois à un grand écart didactique, quelquefois très périlleux. Mais la fonction information-documentation n'est pas suffisamment bien placée dans le rang des priorités des Directeurs de Missions Locales (comme dans les organismes de formation, quoi !) pour que je fasse la fine bouche !

Le premier contact est relativement agréable et la journée se déroule comme prévu, même si je sens que "l'hétérogénéité sous de multiples aspects" est bien au rendez-vous. Dès l'abord, transparaissent des désirs individuels de paroles, paroles de plaisir de sortir le nez de dedans le guidon, paroles de soif de contact hors le bureau du quotidien, paroles de besoin de reconnaissance dans ce qu'on fait, dans qui on est... Les trois journées de formation s'enchaînent tant bien que mal... Ici, comme à Beaune il y a trois semaines, la sagesse est venue parasiter la prestation. Je m'explique.

Les commanditaires - ici les animations régionales des missions locales - attendent de moi que j'établisse une relation privilégiée avec un groupe de personnes désignées, afin que je leur communique les rouages d'une technique déterminée qui se résumerait sous l'appellation "Documenter", et en trois jours s'il vous plaît. Sauf que, malgré tous les efforts didactiques ou pédagogiques qu'on voudra, la technique n'existe pas hors des conditions matérielles et intellectuelles de son déploiement. Quant à l'acte pédagogique en lui-même, il est purement impossible hors des conditions matérielles et intellectuelles de l'expression de sa nécessité. D'où, dans un premier temps, l'incontournable travail initial sur les attentes des stagiaires aux-mêmes, travail relativement approfondi qui permet au groupe stagiaires-formateur de prendre ses marques intérieures et provisoires. Mais, la porte ainsi ouverte à l'expression de soi pour les stagiaires ne se referme pas de sitôt ! On assiste notamment, au fil de la formation, à l'émergence automatique et systématique des questions concernant les conditions de possibilités de la fonction documentaire. Celles-ci ne relèvent pas du champ de la documentation, de la technique documentaire, mais du champ de l'organisation et de la stratégie des organisations, aux quatre niveaux : mission locale, antenne de mission locale, mais aussi animation régionale, voire niveau national. La formation apparaît alors comme triple travail de conscientisation :
  • des prérequis organisationnels et stratégiques,
  • de la professionnalité de la fonction documentaire,
  • des prérequis d'ordre technique et matériel.
Et quand je dis que la sagesse vient parasiter la prestation, je veux dire que, dans le temps même où il prend conscience que la fonction documentaire n'est pas fatalement occupée par des bricoleurs mis au placard, loin s'en faut, le groupe de stagiaires est amené, comme par la force des choses, à défaire ce qu'une décennie de technocrates aidés de leurs soldats universitaires a patiemment construit, je veux parler de l'industrialisation de la formation, de cette idée toute libérale, trop libérale, de la formation-marchandise qui veut que la formation (ne) soit (que) prestation déconnectée de ses conditions concrètes d'usages hormis ce qui peut se dire en termes de rentabilité immédiate, voire de profit mécanique. Et ce ne sont pas les récentes modifications du droit de la formation qui vont contrarier cette tendance lourde, que ces modifications s'appellent simplification ou autrement ! Voyez le tout récent Journal Officiel n°152 de ce 1er juillet 2005 p.10870 sqq., avec un rapport et une ordonnance : il suffit maintenant d'un ... bon de commande (ordonnance n°205-731 du 30 juin 2005) !
Avez-vous remarqué qu'ici le commanditaire et le bénéficiaire de la formation sont différents, que les attentes de l'un - qui est donneur d'ordre, qui prescrit une prestation - et de l'autre - qui "suit" la formation - sont fatalement différentes, voire contradictoires quelquefois. S'élabore ainsi un curieux ménage à trois - prescripteur, bénéficiaire et formateur. Le prescripteur aura beau, d'une part, avancer sans cesse sa qualité de passeur de commandes, et, d'autre part, entretenir du lien hiérarchique avec ceux et celles qui seront bénéficiaires de la formation commandée, il ne pourra empêcher les bénéficiaires réels et la personne du formateur d'établir entre eux une relation humaine, trop humaine. La politique technique gère des marchandises, la politique hiérarchique distribue des pouvoirs, quand la politique humaine cherche de la signification. Et cette quête de signification ne va pas sans la capacité à mettre en cause les certitudes de la technique et les certitudes de la hiérarchie...


affiche_2005Le 29 après la formation, je me hâte de traverser le Rhône, pour aller m'atta- bler sur la place de l'hôtel de ville, face à un podium installé pour le festival de jazz... Vienne est un vaste big-band. À tous les coins de rues ça chante et ça swingue... Ça fait rudement du bien : savourer de la musique en goûtant une bière à l'ombre d'un parasol... Laurence, de la Mission locale du Genevois, vient un temps s'asseoir à ma table. Nous parlons de choses et d'autres, un peu. Nous écoutons ensemble l'orchestre de jazz, un peu. Puis elle est partie retrouver quelques autres membres du groupe. Elles ont pris rendez-vous entre elles devant un hôtel pour vivre ensemble une soirée jazz. Quant à moi je reprends vers 19h45 la route de Saint Romain en Gal. Mon repas du soir m'y attend et je ne le manquerais pour rien au monde. Pas même une note de musique endiablée ! Et puis, il est tombé quelques gouttes aujourd'hui. Peut-être arriverai-je à vivre fenêtre fermée, et à dormir... J'ai hâte d'y être !

En discutant avec Nadine et Linda, deux autres stagiaires, je me rends compte qu'il y a, tout près de l'hôtel où je n'arrive pas à dormir, un hôtel normal, avec climatisation notamment... Il y a une dizaine d'euros à dire...

Ça vaut combien le temps de la reconstitution de la force de travail ?




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